Page:Revue des Deux Mondes - 1893 - tome 116.djvu/244

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

que le goût du public le comportera. Pour toutes les valeurs cotées ou susceptibles de l’être, c’est-à-dire répondant, au point de vue du nombre et de la forme des titres, aux conditions régissant l’admission à la cote, les opérations devront être effectuées par les agens de change exclusivement. Le rôle des coulissiers, en ce qui concerne ces opérations, devra se borner à la transmission des ordres de leurs cliens aux agens et à l’inscription des opérations ainsi faites sur un répertoire où elles seront relevées séparément avec le nom de l’agent chargé de l’exécution.

C’est sur les opérations constatées dans ces conditions que portera l’impôt voté par la chambre, impôt qui est de 10 centimes par 1,000 francs du capital objet de l’opération.

On a dit que l’adoption de la loi Tirard allait produire une véritable désorganisation du marché. Il est certain que le volume des transactions sera très notablement amoindri : un grand nombre de maisons de coulisse disparaîtront, soit en émigrant, soit par une liquidation pure et simple. Celles qui subsisteront verront sûrement diminuer l’importance de leurs affaires. L’arbitrage, qui fournit un élément si précieux à l’activité du marché, oubliera en partie le chemin de Paris. Bref, le marché libre va perdre une grande partie de sa clientèle dont la Compagnie des agens de change n’héritera que partiellement.

Les affaires diminueront en outre parce que le courtage que prélèvent les agens de change est beaucoup plus élevé que celui dont se contentent les coulissiers, et que l’impôt va le rendre de 50 0/0 plus onéreux encore. On a dit à la chambre, et le ministère en a fait en quelque sorte la promesse, que le courtage officiel serait prochainement réduit en proportion telle que les agens de change se trouveraient assumer pratiquement toute la charge de l’impôt.

Une telle mesure atténuerait de beaucoup les inconvéniens de la législation nouvelle. Quant aux coulissiers, ils pourront sans doute découvrir le moyen d’établir avec le parquet une sorte de modus vivendi qui leur permette, tout en satisfaisant aux conditions de la loi, d’avoir une part dans l’extension d’affaires que pourrait provoquer l’abaissement du courtage.

Le premier effet du vote a été de déterminer des achats rapides sur le 3 pour 100 dont les coulissiers sont, dit-on, plutôt vendeurs, et des offres précipitées en valeurs ottomanes sur lesquelles au contraire le marché libre supporte de très grosses opérations à la hausse. La rente a gagné 50 centimes, les valeurs turques ont perdu, le 1 pour 100 de la dette générale, 35 centimes à 22 fr. 05, la Banque ottomane 10 francs à 580. Mais bientôt la rente a été ramenée à 98.30, et les valeurs turques se sont relevées, le 1 pour 100 à 22.20, la Banque à 585.

Le 21 courant, la Bourse avait été surprise du chiffre élevé, 26