Page:Revue des Deux Mondes - 1893 - tome 115.djvu/905

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de la céramique mycénienne, on a constaté, non d’abord sans quelque surprise, qu’il n’était pas rare de les rencontrer parmi les objets recueillis dans les tombes de la vallée du Nil. M. Flinders Pétrie a découvert la poterie qu’il appelle égéenne dans des nécropoles contemporaines de la XVIIIe et de la XIXe dynastie. Plusieurs musées possèdent des vases achetés en Égypte, qui sont très nettement marqués au cachet du goût mycénien, ce qui suppose que les Égyptiens, vers ce temps, appréciaient, pour la beauté de sa glaçure et l’étrangeté de son ornementation, cette poterie, fort différente de celle qu’ils fabriquaient.

L’Égypte ne pouvait payer ces importations qu’en produits de son sol et de son industrie ; on ne connaissait pas alors la monnaie, et le commerce était soumis au régime du troc. Il y avait donc lieu de s’attendre à trouver des marchandises égyptiennes chez le peuple qui façonnait et exportait ces vases. Cette prévision s’est réalisée. Nous avons signalé ces pâtes de verre, employées pour le costume et la parure, qui ont été utilisées, à Tirynthe, dans la décoration du palais ; on sait que l’industrie du verre a eu son berceau en Égypte, où les Phéniciens en ont appris les procédés. Le verre a, dans la frise de Tirynthe, cette belle couleur bleue que les Égyptiens savaient donner à ce qu’ils appellent le khesbet ou lapis-lazuli artificiel. Les fouilles de Mycènes ont livré des plaques de faïence revêtues de ce même émail bleu ; ces faïences ont été particulièrement à la mode sous les Ramessides. Ce sont encore, à Ialysos et à Mycènes, des scarabées avec inscriptions hiéroglyphiques ; ce sont, à Mycènes, sur des lames de poignards, des scènes de chasse inspirées de modèles égyptiens ; on y voit fuir les fauves et s’envoler les oiseaux aquatiques parmi des bouquets de papyrus. Le type factice du sphinx est né sur les bords du Nil ; tout en le modifiant légèrement, l’ornemaniste mycénien en a fait un fréquent usage. Un de ses ouvrages les plus soignés est le décor du plafond d’Orchomène ; or, avec ses bordures de rosaces et les enroulemens de ses spirales qui embrassent des fleurs de lotus, il ressemble singulièrement à des plafonds que Prisse d’Avennes a copiés dans des tombes thébaines.

C’est l’Égypte de la XVIIIe et de la XIXe dynastie qui a été en contact avec la Grèce mycénienne ; quelques-uns des monumens que nous avons énumérés permettent de l’établir. Sur un scarabée recueilli à Mycènes, on a lu le nom de la reine Ti, et celui de son époux Aménophis III sur un scarabée de la nécropole d’Ialysos. Le cartouche du même roi s’est encore rencontré à Mycènes sur le fragment d’un vase en faïence égyptienne, et l’on croit aussi le retrouver sur deux plaques de terre émaillée. Il n’est