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l’on montrait jadis ces sépultures dans la citadelle mycénienne, c’est qu’elles y étaient ; pour les y retrouver, on n’avait qu’à les chercher. Ce ne fut pas là pourtant qu’il donna son premier coup de pioche. Troie l’attirait plus encore que Mycènes, Troie où s’étaient livrés ces grands combats dont les moindres épisodes lui étaient familiers, tandis que Mycènes n’avait vu se jouer qu’une seule scène du drame, la dernière, celle du meurtre d’Agamemnon. De 1870 aux premiers mois de 1876, Schliemann se consacra tout entier aux fouilles qu’il entreprit, interrompit et recommença en diverses fois à Hissarlik ; on appelait ainsi la colline sur laquelle se trouvaient les ruines de l’Ilion gréco-romain. Dès lors, il avait découvert le véritable emplacement de Troie ; mais les relations qu’il publiait de ses travaux étaient si confuses, si entachées d’exagération et si mal illustrées que la plupart des savans n’avaient prêté à ses dires qu’une oreille indifférente ; on ne le prenait pas au sérieux. Il allait en être autrement, après la campagne des touilles de Mycènes, qui s’ouvrit en juillet 1876 et dura jusque vers la fin de l’année.


II

Les fouilles de 1876 firent retrouver, en arrière de la Porte-aux-Lions, à l’entrée de la forteresse, parmi des dalles dressées de champ qui délimitaient un enclos circulaire, à une profondeur de 8 mètres environ au-dessous du sol actuel, cinq tombes auxquelles vint plus tard s’en ajouter une sixième, découverte par Stamatakis, qui continua les recherches pour la Société archéologique d’Athènes. Ces tombes étaient des fosses creusées dans le tuf et murées ; comme l’a prouvé M. Dœrpfeld, elles étaient jadis recouvertes d’un plafond de bois. Dans le plus grand et le mieux conservé des corps qui y reposaient, Schliemann reconnut tout d’abord Agamemnon, à ses trente-deux dents et à sa taille qui avait dû être plus imposante que celle d’aucun des autres morts ensevelis dans ce cimetière.

Sans discuter cette question d’identité, nous énumérerons les principales catégories d’objets qui ont été recueillis dans ces tombes, objets qui sont aujourd’hui réunis au musée central d’Athènes où je les ai vus et examinés en 1890. Pour les détails, nous renverrons à l’ouvrage où Schliemann a raconté la plus brillante de ses campagnes et surtout à celui où M. Carl Schuchardt a récemment exposé, avec une méthode et une clarté que Schliemann n’a jamais su mettre dans ses livres, l’ensemble des résultats qui ont été acquis à la science par les