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ignorent les moyens de le mettre en valeur ? .. Il ne reste aucun souvenir du passé. L’école de Versailles a été supprimée. Il n’existe plus aucune école qui en émane. Les bonnes et saines traditions équestres, n’ayant ni appui, ni refuge, ne trouvent aucun moyen de se perpétuer. » Le lieutenant-colonel Mussot, ancien capitaine-major instructeur et rapporteur du conseil d’instruction à l’école de cavalerie, dit dans ses Commentaires, en parlant de l’ancien élève des d’Abzac et du dernier représentant de l’école de Versailles : « Ainsi M. d’Aure passe à côté de l’école de cavalerie actuelle sans daigner la regarder ; il n’y a pas d’école de cavalerie pour lui… M. d’Aure, pour moi, n’a pas encore fait école[1]. C’est une autorité en équitation pratique sans doute, mais… il n’a pas encore de principes bien arrêtés. » Si le comte d’Aure passait alors avec trop d’indifférence à côté de l’école de cavalerie, il faut bien convenir que le lieutenant-colonel Mussot, fidèle à une tradition qui s’est perpétuée à Saumur, ne se faisait pas faute de juger sévèrement tout ce qui n’émanait pas de cette école : « Pour mémoire seulement, dit-il, je dois, dans ces commentaires équestres, faire mention du manège de la maison civile du roi, qui a existé à Versailles sous le nom d’école des pages (si j’ai bonne mémoire), pendant tout le temps de la restauration. À part le talent pratique personnel de MM. d’Abzac et d’Aure, qui n’influèrent cependant aucunement sur l’équitation de l’armée et ne participèrent point au travail de régénération qui s’y faisait, les principes de CETTE PETITE ÉCOLE, qui depuis a voulu se donner pour grande, furent essentiellement stationnaires et inféodés aux erremens de Montfaucon de Rogles… » C’est du reste avec le même esprit d’hostilité et dans des termes souvent peu mesurés, que Mussot parle plus loin de Raabe et de Lancosme-Brèves.

Le comte d’Aure fut néanmoins le maître qui comprit le mieux alors la vraie doctrine de l’ancienne école et tout le parti qu’il y aurait à tirer, pour les écuyers militaires, du travail du manège qui, pour lui comme pour La Guérinière, n’était pas une fin, mais un moyen. Cordier, Chabannes, le comte d’Aure et le comte de Montigny, tous écuyers civils à Saumur, sont d’ailleurs les seuls qui aient laissé un enseignement écrit, et le petit Cours d’équitation du comte d’Aure reste, selon moi, la méthode la meilleure et la plus pratique qui ait été publiée depuis La Guérinière.

En 1847, une nouvelle décision ministérielle avait ordonné la révision du Cours d’équitation de l’école. Le conseil d’instruction

  1. Ces lignes furent publiées en 1854, longtemps après que le comte d’Aure eut pris le commandement du manège de Saumur.