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mestique de la population parisienne devra être au bas mot de 375,000 à 400,000 mètres cubes par jour en moyenne. Et l’Avre réuni aux ressources actuelles, on n’aura encore, aux prochaines canicules, que 220,000 à 240,000 mètres cubes.

Ce n’est pas tout. Il faut être bien persuadé, — et les ingénieurs de la ville ont depuis longtemps cette préoccupation, — qu’un jour viendra, — jour peut-être prochain, — où la question de l’eau, de municipale deviendra départementale, et où l’administration actuelle devra étendre les bienfaits de sa distribution aux communes suburbaines, jusqu’ici médiocrement desservies. Couche, qui fut, sous Alphand, le chef du service des eaux, le pressentait déjà en 1883 lorsqu’il disait : « Personne ne peut prévoir où s’arrêtera la consommation de Paris. Le problème consistera bientôt (il disait bientôt, il y a dix ans) à desservir non pas seulement la ville, mais le département. L’indépendance d’alimentation et de distribution entre deux zones dont l’une entoure l’autre est peu logique et nécessairement onéreuse. » Ce seront alors plus de 600,000 consommateurs nouveaux. Et les 30,000 nouveaux-venus qui viennent augmenter annuellement la population parisienne ? On compte sur eux quand on établit les prévisions des recettes des budgets municipaux. Il ne faut pas oublier qu’eux aussi vont faire couler de nouveaux robinets. C’est peut-être 550,000 à 600,000 mètres cubes d’eau potable que le service privé devra, dans quelques années, délivrer chaque jour !

Il ne faut pas devant de pareilles éventualités dire : « Laissons quelque chose à faire à nos successeurs. Ce sont là leurs problèmes. À eux de les résoudre. » Ceux qui ont charge d’assurer les besoins de la grande capitale n’ont peut-être pas le droit de se détourner ainsi de leurs devoirs. Ce qui se passe depuis plusieurs années prouve, d’ailleurs, la témérité d’une semblable échappatoire. Les besoins croissent très vite. Une administration sage et prudente doit aller au-devant. La prévoyance est son premier devoir.

III.

Mais des sources ? Nous avons vu qu’il serait téméraire de compter en amener encore beaucoup. Ne sera-t-on pas alors conduit à revenir à des procédés qu’on a peut-être trop décriés ? Il y en a plusieurs qui, sans rien préjuger, méritent peut-être un nouvel examen. Je ne range pas aujourd’hui encore dans cette catégorie les projets qui consistent à demander les eaux nécessaires à Paris, soit au lac de Neufchâtel, soit au lac Léman. Le premier, auquel on ne pourrait toucher que si notre diplomatie obtenait