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l’ouvrage d’un docte architecte allemand, M. Frédéric Adler[1], et les beaux mémoires de M. le commandeur Lanciani publiés dans différens recueils italiens d’archéologie. Dans ce mouvement fécond, la France n’est pas restée en arrière et on a pu voir dernièrement à Paris une restauration en relief du noble édifice exécutée sous la direction de M. Chipiez. Mais le Panthéon étant un monument classique, il était naturel que les pensionnaires de l’Académie de France à Rome le prissent pour sujet de leurs études. Ils n’y ont pas manqué et ils l’ont plusieurs fois reproduit avec talent et avec amour. Un des plus anciens parmi eux, un de nos maîtres, M. Achille Leclère, en a fait, une restauration excellente. Malheureusement, elle n’a pas été publiée et ceux qui s’en sont autorisés ont dû la consulter à l’École des Beaux-Arts où elle est déposée. Depuis ont paru, à la suite des envois de MM. H. Labrouste, Baltard, André, Louvet et Daumet, les superbes dessins de M. Brune. Et maintenant, viennent de se produire les découvertes de M. Chedanne dont l’importance est déjà appréciée en Italie à toute sa valeur.

Le Panthéon n’a jamais cessé d’être considéré comme un des monumens les plus remarquables de la Rome antique. En tout cas, il en est, de beaucoup, le mieux conservé ; car s’il a été protégé par une sorte de prédilection dont il a toujours été l’objet, la solidité de sa construction l’a aussi très bien défendu. Impossible de n’être pas frappé de ce qu’il y a d’original dans sa structure. Quand on le voit, on y distingue aussitôt un ensemble de formes et de matériaux unique : une rotonde de briques précédée d’un vestibule quadrangulaire bâti de granit et de marbre. Cet assemblage d’élémens rectilignes et d’élémens circulaires est particulier, il a une physionomie à soi. Peut-être en peut-on trouver l’embryon dans la cabane latine. Mais rien n’est plus éloigné de l’idée que l’on a d’un temple, et surtout d’un temple inspiré des Grecs, qu’un pareil composé. Aussi, a-t-il été accepté comme un type de l’architecture romaine et même comme une œuvre tout empreinte de l’austérité républicaine.

Quoi qu’il en soit, c’est un monument de grand caractère. L’aspect en est sévère et même un peu sombre. Si le portique est ouvert et élégant, la rotonde, rigoureusement fermée au regard, a quelque chose de pesant et la partie voûtée qui la surmonte, vue du dehors, ne donne pas l’idée de son élévation. Il faut entrer dans l’édifice pour en comprendre la beauté. Alors on ne peut qu’admirer l’ensemble qu’il présente, et ses proportions robustes, et la hardiesse de sa coupole, et les belles dispositions de ses

  1. Das Pantheon zu Rom. Einunddreissigstes programm zum Winckclmannsfest der archäologischen Gesellschaft zu Berlin, 1871.