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UN HISTORIEN
DE LA
MONARCHIE DE JUILLET

Histoire de la Monarchie de Juillet, t. VI et VII, par M. Thureau-Dangin. Paris, 1892 ; Plon et Nourrit

M. Thureau-Dangin vient d’achever un de ces grands ouvrages qui paraissent dater d’une autre époque, tant sont rares aujourd’hui les ouvriers assez tenaces pour entreprendre et mener à bien d’aussi laborieuses constructions. Les tomes VI et VII de l’Histoire de la monarchie de Juillet conduisent le récit jusqu’à la révolution de 1848. Ces deux volumes sont peut-être les meilleurs de l’œuvre ; ils ne trahissent nulle part les lassitudes d’esprit qu’on aurait excusées chez l’auteur, après son long commerce avec les parlementaires du juste milieu ; ils vivent d’une vie plus intense, à mesure qu’ils approchent du dénoûment dramatique et qu’ils le racontent. C’est justice de proclamer très haut la souplesse et la force du talent chez M. Thureau-Dangin ; d’autant plus haut, que l’emploi de ce talent lui a fait rencontrer quelque résistance dans la frivolité publique. Il semble que nos générations soient encore prévenues par le mot cruel et vrai de Lamartine : « La France s’ennuie ! » et qu’elles craignent de s’ennuyer rétrospectivement en se replongeant dans l’histoire de ce temps. Crainte bien gratuite : l’art de l’écrivain en a ranimé tous les aspects, débats parlementaires, négociations diplomatiques, figures, actes et paroles. Cet art apparaît surtout dans la dextérité avec laquelle il encadre les portraits