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annoncent un avenir de gloire, qu’elles semblent l’aurore du bonheur public. Le premier jour est consacré à Jupiter Optimus Maximus, la grande divinité de Rome qui siège au Capitole ; Auguste et Agrippa lui sacrifient un bœuf blanc, dans le sanctuaire où il réside. Le lendemain, c’est le tour de Juno Regina, au Capitole aussi, et l’on immole solennellement une vache en son honneur. Le troisième jour, la fête se transporte au Palatin, dans le temple merveilleux d’Apollon qu’Auguste vient de bâtir, et qui est, suivant l’expression de M. Mommsen, comme la chapelle du palais impérial. Apollon était devenu le dieu particulier, le patron de la dynastie régnante. À la bataille d’Actium, il avait donné la victoire à Octave, et depuis il le faisait réussir dans toutes ses entreprises. Aussi l’empereur négligeait-il pour ce nouveau protecteur le culte de Vénus, la mère des Énéades, que César avait tant honorée. C’est chez lui que doit se clore la fête. Auguste et Agrippa la terminent en lui offrant des gâteaux sacrés. Ajoutons que pendant les deux nuits et les deux jours qui précédèrent, d’autres cérémonies encore s’étaient accomplies, dont l’inscription ne nous dit qu’un mot. Cent dix matrones fautant qu’il y avait d’années dans le siècle), toutes âgées de plus de vingt-cinq ans et mariées, avaient célébré, en l’honneur de Junon et de Diane, ce qu’on appelait des sellisternes (sellisternia). Les lectisternes et les sellisternes étaient des banquets solennels qu’on offrait aux divinités pour leur faire honneur. Près de la table, couverte de toute sorte de mets, les dieux étaient couchés dans des lits, comme les Romains quand ils prenaient leurs repas, les déesses placées sur des chaises, et l’on faisait la comédie de les servir avec toute sorte de manières respectueuses. Voici enfin quelle fut la dernière des cérémonies, et peut-être pour nous la plus importante : le troisième jour, vingt-sept jeunes gens et vingt-sept jeunes filles, choisis dans l’aristocratie romaine, et dont les pères et les mères vivaient encore, chantèrent l’hymne de la fête. L’inscription tient à nous dire qu’elle avait été composée par Horace. C’est ce que nous appelons « le chant séculaire. »

Nous sommes arrivés au terme des cérémonies officielles, mais les réjouissances vont durer quelque temps encore. Après un jour de repos (le 4 juin), les jeux reprennent, des jeux qui ne sont plus donnés par l’État et à ses Irais, mais que les magistrats offrent au peuple pour reconnaître les honneurs dont on les a revêtus, et que, pour cette raison, on appelle ludi honorarii. Ils se prolongent pendant sept jours entiers (du 5 au 11) ; les uns ont lieu sur la scène de bois du Champ de Mars, dont on a parlé plus haut ; d’autres, dans le théâtre de Pompée, le plus vaste et le plus beau de Rome ; d’autres, sur celui de Marcellus, qui n’était pas tout à fait fini et