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interprêter l’attitude de l’Apollon du Belvédère selon le récit de Trogue-Pompée. La statue primitive est, à son avis, une œuvre de la même date à laquelle ce récit se rapporte ; nous ne la connaissons plus que par la belle copie du Vatican, exécutée sous Auguste, à moins que la très belle tête Steinhauser du musée de Bâle ne soit un débris du modèle.

Puisque nous avons pour but ici de montrer combien ingénieuse et active est devenue l’exégèse concernant l’histoire et l’interprétation des sculptures antiques, à mesure que les découvertes se multipliaient et offraient de nouveaux élémens de comparaison, il convient de mentionner la conjecture du professeur Overbeck au sujet de l’Apollon du Belvédère. M. Overbeck est un des principaux historiens de l’art grec dans notre temps ; son opinion doit compter, d’autant qu’elle est ici fort intéressante et spécieuse.

Il est de ceux qui, invoquant la statuette Stroganof et même une autre statuette analogue de la collection Pulszki, croient à l’égide. Admettant aussi que le récit de Justin nous indique la vraie origine de la statue dont nous avons la copie au Belvédère, il estime qu’elle formait le centre d’un groupe où figuraient également les deux déesses mentionnées par l’historien, Diane et Minerve. Il est même convaincu que nous avons conservé deux statues qui sont des répliques de celles qui accompagnaient l’Apollon. On connaît assez l’élégante Diane à la biche, dite Diane de Versailles, que nous possédons au Louvre. On a remarqué depuis longtemps ses frappantes analogies avec l’Apollon du Belvédère ; on a pu conjecturer que les deux ouvrages étaient du même sculpteur : même facture, même élégance, même fierté de visage, même approche subite, ce semble, contre un ennemi dédaigné. Le bras gauche est restauré ; on peut penser qu’au lieu de s’abaisser vers la biche aux cornes d’or, la main gauche, levée, tenait l’arc, la déesse combattant aux côtés de son frère Apollon. Quant à Minerve, elle aurait été représentée dans le groupe par la célèbre Promachos du musée de Naples. Apollon, au centre, brandissait l’égide ; Diane, à gauche pour le spectateur, tirait de l’arc, et Minerve, à droite, se servait de la lance et du bouclier pour protéger le temple de Delphes contre les barbares gaulois.

Cette conjecture, dit M. Helbig, est de celles qu’on ne saurait aisément confirmer ni réfuter.

Quant au groupe du Laocoon, M. Helbig le tient pour une œuvre originale exécutée à Rhodes entre les années 250 et 200, un peu après l’Apollon et avant la frise de l’autel de Pergame. — Quelles raisons y a-t-il de se prononcer pour cette date ? La plus générale serait que le Laocoon, dans la série des grandes œuvres antiques, doit être placé au temps où l’art, continuant