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à la représentation des minorités, etc. Évidemment, toutes ces propositions n’ont pas la même importance ; mais la nouveauté la plus grave, la plus inattendue, que M. Beernaert a cru devoir ajouter comme un supplément ou comme un couronnement à son programme révisionniste. c’est ce qu’il appelle le « referendum royal » : en d’autres termes, ce serait ni plus ni moins l’introduction du plébiscite dans la constitution par le droit attribué au prince de s’adresser personnellement au pays, de faire un appel direct à l’opinion populaire sur les lois que fait le parlement. Ici on entre dans l’inconnu ; on ne fait plus une révision partielle, on touche au principe même de la constitution belge.

Qui ne voit en effet que ce « referendum royal » n’est rien ou qu’il altère profondément l’esprit et l’essence des institutions libres de la Belgique ! Le jour où le droit du plébiscite entre dans la constitution, c’est l’indépendance parlementaire qui en sort. On aura beau équivoquer : ce n’est plus le régime constitutionnel, c’est un acheminement vers le régime personnel et césarien. Ce droit d’appel au peuple est un dangereux présent fait à l’autorité royale et une diminution inévitable de la liberté des assemblées. Tous les esprits sérieux des deux grands partis belges l’ont bien senti, aussi le referendum a-t-il rencontré [aussitôt une vive et décisive opposition dans les deux camps : il a été désavoué résolument par un des chefs principaux du parti catholique, M. Wœste, aussi bien que par le chef du vieux parti libéral, M. Frere-Orban. L’unique résultat du nouveau programme révisionniste est d’avoir créé une singulière confusion, et en dépit d’un vote préliminaire que M. Beernaert vient d’obtenir pour son referendum, la question ne reste pas moins incertaine, singulièrement périlleuse dans un pays libre comme la Belgique.


CH. DE MAZADE.


LE MOUVEMENT FINANCIER DE LA QUINZAINE

Malgré l’inauguration du nouveau régime commercial, malgré la maladie de notre ministre des finances, M. Rouvier, malgré les nouvelles de plus en plus décourageantes que reçoit l’Europe sur la situation financière de la République Argentine et du Brésil, malgré l’aggravation du désordre budgétaire et des conditions du change en