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fallacieux espoir d’être gracié. Vous n’avez plus aucune commisération à attendre, au moins de ce monde. Je ne puis que vous appliquer le châtiment que la législation réserve aux meurtriers : vous serez pendu par le cou, jusqu’à ce que mort s’ensuive. » A peine ces paroles sont-elles prononcées, un long frémissement court dans la salle. Le public se lève et se dirige vers la sortie. Conway, reconduit en bas, est amené rapidement jusqu’à l’une des portes latérales de l’édifice. Une voiture où il monte, accompagné de deux vigoureux agens, le transporte au galop à l’ancienne et noire prison de Kirkdale, où les condamnés à la peine capitale subissent l’expiation suprême.


IV

Des discussions se sont élevées récemment dans la presse anglaise sur la question de savoir quelle est la méthode la plus sûre et la plus rapide d’exécuter les criminels. Les expressions dont s’est servi le président de la cour d’assises pour annoncer à l’accusé qu’il paierait son forfait de la vie, ne constituent qu’une simple formule qu’il ne faudrait pas interpréter à la lettre. En réalité, le patient n’est nullement suspendu au gibet jusqu’à ce que survienne l’immobilité cadavérique. On a la prétention d’employer des procédés infiniment plus scientifiques et foudroyans. L’individu que la justice anglaise expédie dans l’autre monde est soumis à une opération qui ne ressemble en rien à la pendaison primitive dont l’impitoyable Lynch traçait autrefois les règles aux Américains. Elle consiste dans la désarticulation du cou à la suite d’un ébranlement formidable, et ce n’est qu’après la secousse déterminée par la chute dans les profondeurs d’une trappe que le corps, pendant quelques instans, demeure attaché à la potence. Selon l’avis des criminalistes, dont la sollicitude et les préoccupations accompagnent les condamnés jusqu’à l’échafaud, il est nécessaire, pour arriver à un résultat immédiat, de tenir compte de certains élémens, tels que l’âge de l’homme, sa taille et sa corpulence. Un comité, présidé par lord Aberdare, a établi à cet égard un petit nombre de principes immuables dont il est interdit de s’écarter. En premier lieu, la longueur de la corde (et, par conséquent, du saut dans le vide) est mesurée d’après une échelle proportionnée au poids du sujet. Mais la manière de fixer le nœud est particulièrement importante. Les personnages officiels qui en délibérèrent ont estimé qu’il doit être exactement placé sous le menton, de façon qu’au moment du choc d’arrêt la tête soit rejetée en arrière et que la dislocation se produise du même coup. Alors, si l’on a