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finances. Force était donc de supprimer tout ce qui n’était pas strictement nécessaire. Sans tarder, on supprima d’un seul coup dix-sept facultés des lettres et trois facultés des sciences. Vraiment ce n’était pas une perte. On sait par quelles vues s’était guidé le gouvernement impérial en créant et en multipliant les facultés.

Beaucoup n’avaient eu qu’une existence nominale, et les autres n’avaient guère été, dans les départemens, que des jurys d’examen. Sauf à Paris, on n’avait pu leur donner quelque vie. Voici, comme échantillon, ce qu’écrivait au Grand-Maître, en 1811, le Recteur de l’Académie de Nîmes : « La faculté des lettres a trois cours en activité… Le cours de philosophie compte neuf élèves ; le cours de littérature française en a quatre ; celui de littérature grecque en a trois. Le cours de littérature latine n’est pas ouvert, soit parce que le professeur est absent par congé de son Excellence, soit parce qu’il ne s’est pas présenté d’élèves ; ce cours n’est guère susceptible d’en avoir dans cette ville : les jeunes élèves du lycée suivant le cours de rhétorique ne sont pas tentés de répéter cette classe à l’académie lorsqu’ils ont quitté le lycée ; peu de personnes du monde s’adonnent à l’étude approfondie du latin ; ils en savent toujours assez en quittant les bancs du collège ; aussi cette chaire doit être unie à celle de la littérature française. La chaire d’histoire est sans but dans la faculté des lettres : on n’exige pas d’examen sur l’histoire pour prendre le grade de bachelier ou de licencié. Aussi elle est inutile et doit être supprimée. » — Ailleurs, même situation. Des élèves du lycée, des candidats au baccalauréat, voilà presque partout l’unique clientèle des facultés des lettres : à Cahors, en 1814, trente-cinq élèves inscrits au cours d’histoire ; tous élèves du lycée. A Orléans, à la même date, vingt-six élèves, tous élèves du lycée ou de l’école secondaire ecclésiastique[1]. A Strasbourg, cent trente-six élèves ; cent treize suivent le cours de philosophie en vue du baccalauréat. A Lyon, pour plus de facilité ; le cours de philosophie se fait au lycée. Ça et là, cependant, quelques exceptions. A Caen, sur quarante-deux étudians de la faculté des lettres, vingt-deux sont du lycée et vingt de la faculté de droit[2]. A Montpellier, cinquante et un élèves de la faculté de médecine sont en même temps inscrits à la faculté des lettres[3]. Au total il y avait, en 1814, dans les facultés des lettres, mille deux cent dix étudians inscrits ; lisez, défalcation faite des soixante-dix élèves de Paris, presque tous élèves de l’École normale, environ onze cents candidats au baccalauréat ès-lettres. Candidats

  1. Archives nationales, F. 17-4637.
  2. Ibid., F. 17-4653.
  3. Ibid., F. 17-4657.