Page:Revue des Deux Mondes - 1892 - tome 109.djvu/116

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
110
REVUE DES DEUX MONDES.


saint Étienne et des hommes magnifiques de la cité de Bourges, moi qui demeure dans le pays du Berry et qui vous suis soumis, je viens vous supplier qu’après les trois jours d’affiches, formalité que j’ai observée suivant la coutume, votre bonté m’autorise à établir ce qui était contenu dans mes titres, afin que la loi soutienne et protége les stipulations au lieu de les faire périr. »

Il résulte de ce document qu’il y avait en Berry, sous la première et la seconde race, une curie, des défenseurs, et que Bourges, par ses institutions, était presque encore romaine. Il y avait, en outre, une noblesse gallo-romaine, toujours puissante, même en présence des Francs victorieux, parce que dans cette noblesse se recrutait le clergé. On ne sait rien de notre province au temps des rois fainéans et des luttes des maires du palais de la Neustrie et de l’Austrasie. Toutefois, il semble avéré que dans le gouvernement des villes par les notables, les « hommes magnifiques de la cité, » magnifici viri civitatis, restèrent investis d’une juridiction à laquelle une royauté soupçonneuse, jalouse de ses priviléges, devait bientôt porter atteinte.

V. — DE L’EMPEREUR CHARLEMAGNE À HUGUES CAPET.

Au VIIe siècle, le Berry fit partie du royaume de Bourgogne, Clovis II ayant hérité de son père Dagobert, lequel avait lui-même reçu de Clotaire II toutes les possessions des Francs dans les Gaules. Mais trop de sympathies, trop de liens, le rattachaient aux provinces du Midi pour qu’il ne s’abandonnât pas au duc Eudes, dès que celui-ci, par suite de conquêtes et d’insurrections, fut devenu le maître de la seconde Aquitaine. Sans les Sarrasins, qui le vainquirent près de Bordeaux, et qui, très probablement, dévastèrent le centre de la France, peut-être eût-il triomphé de Charles-Martel, avec lequel il se mesura plusieurs fois, Celui-ci, après avoir rejeté de l’autre côté du Rhin Saxons, Bavarois, Allemands et Suèves, alors races pillardes, toujours disposées à chercher fortune hors de chez elles, dut accourir dans les plaines de Poitiers pour y anéantir l’armée d’Abd-el-Rhaman. Eudes mort, les fils de Charles -Martel, Pépin et Carloman, triomphèrent aisément des héritiers du duc Eudes. « Pépin le Bref, dit un chroniqueur, arriva devant Bourges avec la nation entière des Francs. » Il s’en empara après un siége pénible ; il y fit construire un palais, afin de bien établir que cette ville serait désormais le point d’où les rois carlovingiens surveilleraient et contiendraient les an-