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LE BERRY.


Bourges, la grande voie des Arvernes. Elle desservait Ardentes, Alerea, et Saint-Ambroix-sur-Arron, l’ancien Ernotrum. Une autre route qui partait de Bourges et qui allait finir à Tours, — Cœsarodunum, en touchant à Gabris ou Chabris, suivait les rives du Cher jusqu’à Thezée ou Tasciaca. La voie à Augustodunum, — Autun à Bourges, passait l’Allier non loin de sa jonction avec la Loire, et traversait Dunum, — le Dun-le-Roi de nos jours.

Il est resté des traces nombreuses de ces travaux des Romains, mais les guerres dont on lira plus loin le résumé empêchèrent leur entretien et, depuis de longs siècles, ces voies magnifiques et ingénieusement ouvertes sont restées sans utilité.

La vigne, introduite par l’empereur Probus, vint s’ajouter aux blés, aux lins, aux fers et à l’élevage des bêtes à laine qui enrichissaient agriculteurs et industriels. Cette culture devint tellement importante par la suite, que ceux qui s’en occupaient formèrent une puissante corporation dite des Vignerons. Jamais viticulteurs d’aucun pays ne furent plus sollicités par les Berrichons politiques de toute nuance que les vignerons du Berry.

C’est au temps de cette prospérité qu’Avaricum se transforma en Bilungum, S2ins autre motif visible que celui d’être en rapport avec le nom de ces habitans. Un forum, un théâtre, des temples, des arènes, attestent son importance, ainsi que celle d’autres localités et plus particulièrement Château-Meillant. Les Romains, pour rendre la voix de leurs acteurs plus sonore, élevaient la scène de leurs théâtres sur des amphores vides. Un amoncellement d’amphores à Château-Meillant en a conservé l’ingénieuse disposition.

L’empire romain, se sentant menacé de tous les côtés par l’approche des Barbares, et voulant enlever le plus possible de leurs richesses aux pays qui allaient lui échapper, pressura si fortement les Gaulois, et en particulier les Bituriges, que ceux-ci, sous le nom de Bagaudes, se mirent à piller leurs voisins. Que les provinces fussent ruinées par les Romains ou les Ostrogoths, le résultat n’était-il pas le même ? C’est alors que les citoyens de Bourges, craignant pour leurs richesses, entourèrent leur ville d’épaisses murailles ; elle n’en fut pas moins submergée sous le flot des Barbares, et les aigles romaines, après avoir plané pendant cinq siècles sous le ciel de la Gaule, disparurent à jamais.

En l’an 475, les Visigoths, sous la conduite d’Euric, occupaient tout le pays situé entre le Rhône, la Loire et les deux mers. Le Berry et l’Auvergne tombèrent en leurs mains. Il serait injuste de ne pas dire, à l’honneur de la seconde de ces provinces, qu’elle ne fut pas vaincue, mais cédée par Rome aux envahisseurs. L’Au-