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M. Bode a repris et complété son travail en le rectifiant sur bien des points. Dans ses incessantes pérégrinations à travers l’Europe, il avait pu voir et revoir la presque totalité des tableaux de Rembrandt, et mieux que personne il était à même d’en dresser le catalogue. Le premier, il avait appelé l’attention sur les œuvres de la jeunesse du maître, et il arrivait à lui restituer ainsi toute une série d’ouvrages ignorés jusque-là et dont les attributions autrefois contestées sont aujourd’hui généralement admises. Remaniant la notice qu’il avait d’abord fait paraître dans les Graphischen Künste de Vienne, M. Bode nous donnait le remarquable travail inséré dans ses Études sur l’histoire de la peinture hollandaise[1] où il caractérisait dans ses traits essentiels le développement progressif de Rembrandt. Depuis, dans ses notices sur les collections publiques ou privées de l’Allemagne, publiées également par les Graphischen Künste, M. Bode, passant en revue les œuvres contenues dans ces collections, a porté successivement son attention sur certains points spéciaux de la carrière de l’artiste. Récemment encore dans un journal de Munich[2], il améliorait et complétait son catalogue des tableaux de Rembrandt en tenant compte des observations nouvelles qu’il a pu faire et en indiquant, pour un assez grand nombre de ces peintures, les changemens de possession survenus en ces dernières années.

En même temps, la fondation du recueil périodique hollandais, Oud-Holland, dirigé par MM. A. Bredius et de Roever, les deux érudits bien connus, imprimait aux recherches dans les archives un nouvel essor et procurait à la critique d’art une foule de documens précieux, découverts et commentés avec une rare sagacité par les deux directeurs. Grâce à eux, des faits inexpliqués et des lacunes jusque-là persistantes dans la biographie de Rembrandt sont aujourd’hui dévoilés, et cette existence mystérieuse nous a peu à peu livré ses secrets. Je ne saurais assez, pour ma part, dire tout ce que je dois à leur amicale obligeance et les remercier ici de l’aide qu’ils ont prêtée à mes études. Si, après Vosmaer, il m’est devenu possible de retracer la vie de Rembrandt en serrant de plus près la réalité, c’est eux surtout qui m’en ont fourni les moyens.

Après des efforts si consciencieux et si féconds, on ne peut guère espérer que les archives néerlandaises nous réservent désormais des découvertes bien nombreuses, ni bien importantes. De temps à autre, cependant, quelque trouvaille imprévue peut encore grossir

  1. Studien sur Geschichte der hollaendischen Malerei, 1 vol. in-8o ; Brunswick, 1883.
  2. Münchner neueste Nachrichten du 9 juillet 1890.