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réalisation de quatre hypothèses : 1° que la modification de l’impôt sur la grande vitesse, telle qu’elle est combinée, n’influera pas sur les recettes des compagnies de façon à réagir sur les perceptions du trésor et sur le jeu de la garantie d’intérêt ; 2° que la plus-value attendue dans les recettes des douanes par suite de l’application du nouveau tarif ne sera pas inférieure à 70 millions ; 3° que la perte prévue sur les recettes de l’enregistrement et du timbre sera exactement compensée par la nouvelle taxe, dite des frais de justice ; 4° enfin, que le remaniement de l’impôt sur les boissons n’aura pour conséquence ni un affaiblissement des produits de l’impôt, ni une augmentation des frais de perception. Qu’une seule de ces quatre hypothèses ne se réalise pas, et l’équilibre du budget est immédiatement détruit. Depuis la présentation de ce budget et avant même que la chambre en ait abordé l’examen, 21 millions de dépenses nouvelles et non prévues ont apparu. La commission ne peut s’abuser au point de croire que l’exercice 1892 s’écoulera sans demander de crédits supplémentaires, lorsqu’il en a été ouvert pour 83 millions pour l’exercice 1890, et que ceux qui ont déjà été demandés pour l’exercice en cours dépassent 30 millions. L’illusion est d’autant moins possible que la plus grosse part des économies que la commission se flatte d’avoir opérées a porté sur les ministères de la guerre et de la marine : 30 millions sur le premier et 7 millions sur le second. Or ces deux départemens sont de perpétuels quémandeurs, dont la chambre ne repousse jamais les demandes, et ils reprendront sous la forme de crédits supplémentaires ce qu’on leur a momentanément retiré.

La commission compte, sans doute, pour le maintien ou le rétablissement de l’équilibre, sur les annulations de crédits non employés qui s’élèvent tous les ans à une somme considérable, ce qui prouve, soit dit en passant, que les ministres demandent et obtiennent au-delà des besoins réels. M. Rouvier calcule que ces annulations atteindront le chiffre de 55 millions pour l’exercice 1890 : ce qui permettra de régler cet exercice avec un excédent de recettes presque équivalent. Jusqu’ici les recouvremens de 1891 présentent une plus-value notable sur les évaluations de recettes, calculées d’après les résultats de 1889, et aussi sur les recouvremens correspondans de 1890. Cette plus-value ne serait pas inférieure à 50 millions. C’est un résultat dont on a lieu de se féliciter, mais ce serait en exagérer la portée que de le présenter comme une preuve d’une éclatante prospérité. On ne doit pas perdre de vue que dans la seule année 1890 les chambres ont voté pour 39 millions de taxes nouvelles, sans compter la nouvelle surtaxe sur les sucres qui est toute récente. Quand on compare les résultats de 1890 et