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d’une institution de crédit, pouvant satisfaire les besoins de la région. La chambre de commerce de Strasbourg pétitionnait pour obtenir la création d’une succursale de la Banque de France. Dans la haute Alsace, les mêmes aspirations se faisaient jour de la part d’une industrie cotonnière puissante. Le 2 janvier 1844, on ouvrit la succursale de Mulhouse ; le 20 août 1846, celle de Strasbourg. En 1848, on supprima les banques départementales, on les fusionna avec la Banque de France, qui put se montrer plus libérale pour l’extension de ses succursales, et en fonder une le 29 juin 1849 à Metz.

Les affaires prirent une rapide et progressive extension ; en 1868, Strasbourg occupe la cinquième place parmi les soixante succursales de la Banque de France, avec un chiffre supérieur à 200 millions par an.

Les tristes événemens de 1870 eurent un contre-coup immédiat sur la vie économique : on se trouva dans les mains de l’ennemi, les relations avec la France étaient coupées et l’incertitude de la fortune de la guerre arrêtait l’arrivée de capitaux d’Allemagne. Une crise fut provoquée principalement par trois faits : la suspension de l’activité des succursales de la Banque de France ; la prorogation des échéances ; la suspension du remboursement des dépôts par les caisses d’épargne. Aussitôt après la capitulation, l’activité de la Banque fut suspendue à Strasbourg, les employés furent retenus prisonniers dans leur domicile. Cette déplorable mesure était la conséquence d’une erreur des autorités allemandes, qui considérèrent la Banque de France comme une institution purement gouvernementale. On reconnut l’erreur, tout en se prévalant de l’étendue des droits de surveillance et de contrôle. En outre, on se trouvait en présence du cours forcé donné aux billets de la Banque par la loi du 12 août 1870 et l’on voulait se prémunir contre une émission nouvelle.

Dès le 4 novembre, le commissaire civil de Kuhlwetter décréta la liquidation de la succursale de Strasbourg, qui fut suivie de celles de Mulhouse et de Metz. Elles reprirent leur activité, mais d’une façon très restreinte : le travail le plus important consista à réaliser le portefeuille (17 1/2 millions à Strasbourg, 2 à Mulhouse, 4 à Metz). Cette liquidation se fît sans perte pour la Banque ; elle fut terminée à Strasbourg peu après le 31 décembre 1871.

Les succursales avaient cessé d’escompter ; le réservoir dans lequel on puisait se trouvant fermé, il en résulta une véritable disette de crédit ; les escompteurs privés, les banquiers, refusaient de prendre du papier.

Le 26 octobre 1870, la chambre de commerce de Strasbourg