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les torpilleurs des deux escadres perdaient sur les cuirassés. L’escadre B dut donner liberté de manœuvres à ses torpilleurs en les faisant convoyer par le Dupetit-Thouars ; les torpilleurs de l’escadre A furent envoyés à l’abri, sous la conduite du Condor.

A quatre heures du matin, l’escadre A doublait la pointe nord-est de Majorque et faisait route sur l’extrémité de Minorque. Elle était ralliée par sa 1re division légère qui, comme les autres divisions légères, prit poste sur les flancs des cuirassés, pour offrir moins de chances de vue à l’escadre B.

Celle-ci avait été prévenue par le Forbin qu’à 3 h. 45, l’escadre A faisait route au N. 70 E., puisqu’elle avait été perdue de vue.

Tandis que la Dragonne portait à la 2e division légère de l’escadre B l’ordre de rallier, le Tage repartait en avant pour reprendre le contact de l’escadre A. Le Tage après avoir fait route jusqu’à 12 milles au nord de Minorque, rejoignait le Trident à 8 h. 15 en signalant qu’il n’avait rien vu et qu’il estimait que l’escadre A n’avait pas passé au nord des côtes de Minorque depuis deux heures du matin.

Avant de modifier sa route, l’amiral Puech renvoya le Tage chasser dans l’est, et, à 3 h. 50 de l’après-midi, le Tage signalait au Trident que l’escadre A se trouvait à 26 milles dans le S. 50 E.

Une avarie survenue dans la machine bâbord de ce croiseur l’avait obligé à marcher avec une seule hélice, d’où le retard avec lequel l’escadre B fut prévenue.

Le Tage, qui avait vu l’escadre A à 16 milles de distance, avait été reconnu par celle-ci, et l’amiral des Essarts, voyant le contact pris et gardé jusqu’à sept heures du soir, se décida à faire route sur Ajaccio ; il pouvait ainsi profiter de son avantage de vitesse pour tenter une opération contre ce point, en avant duquel il était sûr de ne pas rencontrer l’escadre B, dont les mâtures avaient été aperçues à sept heures du soir, mais qu’il y avait lieu de supposer éclairée à grande distance en arrière, vu l’absence constatée de trois bâtimens légers.

L’escadre B avait en effet laissé derrière elle le Sfax, la Couleuvrine et la Dague, qui n’avaient pas été aperçus au coucher du soleil. Par ailleurs, le Tage avait sa vitesse considérablement réduite ; le Forbin et le Faucon avaient tous deux des désagrémens de chaudières ; l’escadre B était désormais dans l’impossibilité de s’éclairer d’une façon efficace et de tenter une surprise sur les croiseurs de l’escadre A ; les torpilleurs de l’escadre B, qui avaient rejoint pendant la journée, étaient encore incapables de se lancer pour une attaque de nuit. Dans ces conditions, l’amiral Puech,