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bannières multicolores furent agitées en tous sens avec un enthousiasme délirant.

Dès lors, M. William Mac-Kinley était l’homme de la révision du tarif douanier dans le sens ultra-protectionniste. Aussi, lors de la réunion, en décembre 1889, du congrès élu en même temps que M. Harrison, le speaker, M. Thomas Reed, désigna-t-il l’ardent représentant de l’Ohio pour la présidence du comité des voies et moyens (budget des recettes) auquel incombait la charge de préparer le nouveau tarif. Lorsque les mesures annoncées virent enfin le jour, il fut manifeste que M. Mac-Kinley n’avait été que trop fidèle à la déclaration de 1888. Il avait dit : uncompromisingly. Ce qu’il donnait était bien du protectionnisme intransigeant.

Le vote de ces bills a soulevé dans l’ancien monde une tempête d’indignation, une explosion de colère. Huit mois ont passé sur cette première impression, et dans l’intervalle, le suffrage universel, en Amérique même, a frappé d’une disgrâce inouïe le parti républicain, endosseur de la politique inspiratrice du tarif. Une énorme majorité du peuple des États-Unis a prononcé la condamnation des tendances et des formules économiques qui s’étaient incarnées dans M. Mac-Kinley. On peut donc juger impartialement aujourd’hui cette législation douanière extraordinaire, qui devait fermer aux marchandises européennes le marché des États-Unis et qui n’a en réalité fait de mal jusqu’ici qu’aux États eux-mêmes et à la masse des consommateurs

I

Les deux bills Mac-Kinley ont été, avec le Silver bill, auquel la Revue des Deux Mondes a consacré une magistrale étude en mars dernier, l’occupation principale du 51e congrès, dans sa longue session, commencée en décembre 1889 et qui ne s’est terminée que le 1er octobre 1890, cinq jours avant la mise en application du nouveau tarif douanier.

Une autre mesure, très importante également, a pris encore une part de l’attention des législateurs de Washington, le bill pour les élections fédérales, désigné familièrement sous le nom de Force bill ou Lodge bill, selon que l’on voulait indiquer sa signification ou son auteur, et qui avait pour objet de transférer, des autorités locales aux agens du pouvoir central, le contrôle sur les élections fédérales dans les États. Le parti républicain, qui ne peut arriver à faire passer qu’une infime minorité de ses partisans dans les États du Sud pour les élections destinées à la formation de la chambre fédérale des représentans, voulait, en s’emparant de la direction