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affirment avoir déterminé, par cette transfusion, sur les animaux mis en expérience, un état bactéricide qui leur permet de résister à l’invasion des bacilles quand l’inoculation tuberculeuse a lieu en même temps que la transfusion, et d’en triompher lorsque celle-ci n’est faite que plus tard, c’est-à-dire lorsque les bacilles ont commencé leur action destructive.

Comme MM. Ch. Richet et J. Héricourt, les expérimentateurs de Nantes ont tenté des essais sur l’homme. Ils ont transfusé du sang de chèvre à des phtisiques et n’ont pas eu à le regretter. Ils disent même avoir constaté une amélioration notable chez les malades qui ont bien voulu se prêter à leurs essais.

Ces faits sont trop peu nombreux et ne sont pas assez concluans pour en tirer des conséquences, mais il faut toujours les enregistrer.

Tout cela se faisait tranquillement, dans le calme des laboratoires, avec la lenteur et la réserve qui conviennent aux recherches scientifiques, lorsqu’au mois de novembre dernier, on apprit tout à coup qu’on venait de découvrir à Berlin le secret de guérilla tuberculose. Cette bonne fortune était échue au docteur Koch, à qui la science devait déjà la découverte du bacille de cette maladie, et qui ne faisait ainsi que compléter sa conquête. Cette grande nouvelle se répandit, dans le monde entier, avec l’instantanéité des communications électriques. Les journaux politiques et la presse médicale s’en emparèrent, et pendant deux mois la lymphe de Koch a rempli les colonnes de toutes les feuilles périodiques, défrayé toutes les conversations et passionné l’opinion publique.

Alors a commencé l’exode des médecins, bientôt suivis par les malades. Malgré les froids de ce rude hiver, on a vu les phtisiques de tous les pays se mettre en route pour la terre promise, pour cette Allemagne que la fortune ne se lassait pas de combler de ses dons.

Cet enthousiasme n’a rien qui doive surprendre. Le professeur Robert Koch était connu depuis longtemps par ses travaux scientifiques et par sa compétence exceptionnelle dans l’étude de la tuberculose. Déjà, le 4 août 1890, à la séance solennelle du congrès international de Berlin, il avait annoncé, devant 6,000 médecins réunis pour cette cérémonie, qu’après de longues recherches, il était arrivé à trouver un remède contre la tuberculose. Dès le mois suivant, il en fit l’application sur des malades, d’abord à la clinique de Bergmann, puis à la Charité et dans tous les grands services hospitaliers de Berlin. Enfin, le 13 novembre, il fit connaître les résultats qu’il avait obtenus. Il décrivit la réaction provoquée par son traitement, chez les tuberculeux seulement, en la donnant