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Les bacilles, avons-nous dit, reprennent toute leur activité lorsqu’ils se retrouvent dans leur milieu normal, c’est-à-dire dans le corps de l’homme et des animaux. Par quelque voie qu’ils y pénètrent, ils se cantonnent dans le point où ils ont été déposés et y évoluent d’abord avec une extrême lenteur. Il faut, dit le docteur Koch, autant de jours aux spores de la tuberculose pour arriver au degré de développement qui les rend infectieuses, qu’il faut d’heures à celles du charbon pour atteindre le même résultat. L’évolution se fait d’abord sur place, et la lésion qu’elle occasionne est primitivement locale ; puis, lorsque la pullulation est en pleine activité, le bacille s’étend de proche en proche et finit par envahir un espace considérable si le terrain s’y prête. Des colonies se forment alors et vont au loin propager la maladie en suivant la voie des lymphatiques et des vaisseaux sanguins.

Les organes qui sont envahis les premiers sont ceux qui sont en rapport le plus immédiat avec le point par lequel l’introduction s’est faite, ou qui ont avec elle les connexions vasculaires les plus étroites. C’est ainsi que les ganglions, que les glandes à circulation compliquée, comme le rein, le foie, la rate, constituent les foyers de prédilection de cet élément parasitaire. Si l’organe primitivement envahi constitue un terrain de culture de premier ordre, s’il suffit à la pullulation des microbes, le reste de l’économie demeure parfois indemne. C’est ce qui arrive lorsque la maladie débute par le poumon. Il n’est pas rare de voir des phtisiques qui n’ont de tubercules que dans la poitrine ; en revanche, ceux qui en ont ailleurs en présentent presque toujours là.

Lorsque l’économie est infectée, que les bacilles ont parcouru les phases de leur évolution, ils sont rejetés avec les excrétions et repassent à l’état latent, en attendant qu’ils trouvent une occasion pour évoluer de nouveau, c’est-à-dire jusqu’au moment où ils rentrent dans un organisme favorable à leur développement. Ils peuvent y pénétrer par toutes les voies. La plus sûre et la plus prompte est celle que la science leur a ouverte ; c’est l’inoculation avec des cultures pures, qu’elle se fasse sous la peau, dans les veines ou dans les cavités séreuses. On peut de cette façon transmettre la tuberculose aux animaux avec une certitude de résultats qui n’appartient qu’à la méthode expérimentale. On peut la transporter d’une espèce sur l’autre, mais toutes ne sont pas également susceptibles de la contracter. Les bovidés sont les animaux qui s’y montrent le plus accessibles. La pommelière (c’est la phtisie de l’espèce bovine) est très fréquente chez les vaches, surtout sur celles qu’on élève dans les villes à l’état de stabulation permanente. Les bœufs y sont moins sujets, parce qu’ils vivent moins renfermés. D’après les recherches faites par M. Villain,