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REVUE MUSICALE

Théâtre de l’Opéra-Comique : le Rêve, drame lyrique en 7 tableaux, tiré du roman de M. Emile Zola par M. Louis Gallet, musique de M. Alfred Bruneau.

Ce n’est pas une œuvre indifférente que vient de représenter l’Opéra-Comique. Au double point de vue littéraire et musical, elle est des plus significatives. On en peut attendre du bien et du mal. Le livret promet beaucoup, et la partition menace encore plus. Voyons d’abord les promesses.

Du seul roman à peu près pur de M. Emile Zola, M. Gallet a tiré l’un des meilleurs poèmes offerts depuis longtemps à la musique. Oui, poème véritable, un peu monotone peut-être, et trop uniment épiscopal et mystique, mais plein de piété et d’amour, de charme surnaturel et de vérité douce, où les figures du livre ont perdu le moins possible de leur taille et de leur physionomie. Et puis, ce drame lyrique prouve bien (et c’en est l’intérêt et la nouveauté) qu’on peut traiter en musique les sujets contemporains, que le langage des sons n’est pas le privilège des âmes d’autrefois, et que nos âmes, à nous aussi, peuvent chanter. On se demandait, en attendant le Rêve, quel effet produiraient sur un théâtre lyrique les personnages modernes, les costumes surtout, des costumes comme les nôtres. Ils y ont paru tout naturels. N’allons pas trop loin, cependant. Par des vêtemens comme les nôtres, je n’entends pas nos costumes de mondains et de riches, nos modes 4e luxe et d’apparat : redingote, habit noir ou robes de visites. Ceux-là