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merveilleuse virtuosité; mais ce qui vaut mieux que la virtuosité, c’est la vie étonnante et l’expression intelligente qui resplendissent sur cette figurine.

Les dames en pied sont présentées par MM. Bonnat, Flameng, Munkacsy, Mengin, Louis Muraton, Sprague Pearce, Thorne, Desvallières, Saint-Pierre, Verwonner, Smith-Lévis, etc. Dans la toile de M. Bonnat, Madame A. C’.., très brune, aux chairs mates, décolletée, les bras nus, en robe de satin blanc, avec une sortie de bal d’étoffe pareille à revers jaunes, se modèle en saillie puissante sur le fond indécis et sombre, comme une statue magnifiquement taillée. Cette façon énergique d’accentuer les contours et les reliefs ne saurait convenir à tous les genres de beauté ; il est clair qu’une beauté trop fraîche ou trop affinée, une beauté de Parisienne chiffonnée et délicate ne saurait s’en accommoder ; mais une beauté très caractérisée, comme était celle de Mme Pasca, comme est celle de Madame A. C.., y prend un éclat plastique surprenant. Il y aurait bien des observations à faire sur tous ces portraits en pied dont nous regrettons de pouvoir seulement donner la liste, et il faudrait étendre ces observations aux portraits, plus nombreux encore, soit à mi-corps, soit en buste qui les avoisinent et parmi lesquels une cinquantaine au moins sont remarquables à divers titres, soit par l’éclat et le charme, comme le superbe portrait de Mme Benjamin-Constant par son mari, soit par la gravité et la fermeté, comme ceux de MM. Buland, Wencker, Moreau de Tours, Edouard Fournier, soit par la délicatesse, la sensibilité ou la grâce, comme ceux de MM. Louis Doucet, Benard, Paul Leroy, L. Simon, etc. La remarque que nous avions faite les années précédentes à propos de l’importance croissante que prennent les femmes dans l’art du portrait est de plus en plus justifiée; on s’en convaincra en regardant les œuvres de Mmes ou Mlles Fontaine, Besson, Perrier, Carpentier, Philippar, Jeanne et Maximilienne Guyon, etc. On trouve aussi quelques charmans portraits de petite dimension, figures en pied ou jusqu’aux genoux, dans des intérieurs ; quelques-uns, ceux de MM. Laurens fils, Vollon fils, Chartran, Rachou, sont particulièrement distingués.

Il nous resterait, pour être complets, à examiner où en est l’art du paysage. Ses manifestations, fort nombreuses, sont le plus souvent intéressantes. On voit toujours, en haut des murailles et même en bas, une quantité d’études d’après nature, brossées avec conscience, beaucoup trop grandes pour ce qu’elles contiennent. C’est en vain que les hommes d’expérience, MM. Français, Harpignies, Busson, Bernier, Lansyer, dont les tableaux exposés, cette année, sont excellens, continuent à montrer qu’on peut fort bien, dans des cadres moyens, enfermer une somme considérable