Page:Revue des Deux Mondes - 1891 - tome 105.djvu/633

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

nos objets d’art, que pour renchérir le pain de nos pauvres : barbares entraves dont le bill Mac-Kinley est l’exemple accompli. Pourquoi nous plaindre si amèrement des États-Unis d’Amérique ? Nos chambres françaises ne se distinguent-elles pas en ce moment par un esprit de clocher auquel l’intérêt général est sacrifié d’un cœur aussi léger que peu désintéressé ? C’est la parabole toujours nouvelle de la paille que l’on découvre dans l’œil du voisin et de la poutre que l’on ne sent pas dans ses propres yeux. Est-ce qu’il n’a pas fallu entreprendre une campagne des plus vigoureuses, avoir un ministre ferme dans ses vues, pour amener les représentans de l’Algérie et du midi de la France à ne pas traiter en étrangers les viticulteurs français de la Tunisie ?

Les prédécesseurs des ministres actuellement au pouvoir, — ils ont été si nombreux qu’il est difficile de préciser lesquels, — avaient-ils pressenti l’esprit de protection outrée et de concurrence enragée qui souffle aujourd’hui sur le monde ? Nous l’ignorons, mais ce qui le ferait supposer, c’est que, de 1881 à 1889, ils ont cherché à se rendre compte des dangers qui nous menaçaient. Pendant huit ans, des missions, dues à l’initiative de divers ministres de l’instruction publique, ont parcouru studieusement la Russie, la Hongrie, l’Allemagne, l’Italie, l’Autriche et l’Angleterre, afin de savoir quelles écoles y avaient été ouvertes, quelles industries avaient été créées en vue d’y développer, tout à la fois, l’industrie artistique et ses débouchés.

Nous avons sous les yeux une collection de rapports provenant de ces missions ; qu’on se rassure, nous nous garderons bien de les passer tous en revue, et, avec d’autant plus d’à-propos que ceux rédigés par le conférencier de nos villes manufacturières, M. Marius Vachon, les résument très heureusement. Les études de l’honorable conférencier ont eu les honneurs de l’Imprimerie nationale, à titre de documens officiels.


I. — LES ÉCOLES PRÉPARATOIRES À L’APPRENTISSAGE.

Presque dans toutes les villes de l’Europe manufacturière, depuis moins d’un demi-siècle, il s’est ouvert des écoles préparatoires à l’apprentissage des arts industriels. Puis sont venus les musées, et, un fait bien digne d’être remarqué par ceux qui croient à une France déchue, c’est que la renaissance artistique actuelle à l’étranger est sortie des travaux d’hommes tels que Mérimée, le comte de Laborde, le marquis de Caumont, Vitet, Viollet-le-Duc.