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idée non contredite par une autre, reçoit dans toutes ces expériences la plus éclatante confirmation.


IV

L’influence des idées sur la vie organique atteint dans l’hypnotisme son plus haut degré et produit les effets les plus curieux, les plus propres à montrer que le mental se retrouve au fond du physique. Notre conscience, à l’état de veille normale, est formée par un ensemble de sensations venant à la fois du dehors et du dedans, mais celles du dedans et de la vie végétative sont obscurcies par les autres comme les étoiles par la lumière du soleil. En supprimant ou en restreignant, par l’hypnotisme, la communication du cerveau avec l’extérieur, on rend possibles de nouvelles perceptions fournies par les organes et dont la succession peut constituer une nouvelle existence, différente de l’ordinaire. La vie mentale reflue à l’intérieur. C’est comme un changement de position par lequel l’œil de l’esprit est retourné du dehors au dedans. Les seules vues sur le dehors sont celles qu’ouvre la parole de l’hypnotiseur, qui se trouve ainsi l’unique évocateur et conducteur des idées. Une foule de sensations organiques et de réactions du cerveau sur les organes internes peuvent alors acquérir un relief inaccoutumé. Le rayon de l’idée va devant soi, jusqu’au bout, sans obstacle ; il va jusqu’à l’organe qui est en rapport avec lui, il y exerce son action, il le modifie dans son propre sens. Au lieu d’agir directement sur la partie du corps inaccessible, l’hypnotiseur agit indirectement par l’idée de cette partie, introduite dans le cerveau et réfléchie du cerveau sur la partie elle-même. Il pétrit et reforme l’organe non plus avec la main, mais avec une idée transmise au cerveau, puis à l’organe.

C’est pour cela que l’hypnotisé reprend sur sa vie végétative l’empire qu’il avait perdu, par l’habitude d’être tout entier à la vie de relation. Il redevient maître de ses organes et, par la seule idée de tel ou tel état, il peut provoquer cet état. L’idée, étant alors seule, est souveraine sur son expression interne et, autant que l’état des organes le permet, elle s’y exprime et s’y réalise. Le petit rayon de l’étoile qui, en plein jour, ne se laissait point voir, redevient visible dans cette nuit ; de plus, il n’y brille que l’étoile évoquée par la parole de l’hypnotiseur.

Pour mieux comprendre cette étonnante influence du mental sur le physique, rappelons qu’à l’origine tous les organes étaient plus ou moins sous la dépendance de la volonté et que tous leurs états