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cylindrique ; la flamme conique, en effet, est surtout chaude à la base du cône et détériore bien vite le fond de la boîte à feu. Ce mode de chauffage présente cet avantage sur les feux de houille, que la flamme peut être régularisée ou même éteinte à volonté, au moyen de robinets placés sur les deux tuyaux. Modifié par Karapetof, l’appareil a pu être adopté pour les locomotives ; il donne aujourd’hui les plus brillans résultats.

En Amérique, où le prix du pétrole baisse de plus en plus, on s’est récemment remis à l’étude, et voici, à titre d’exemple, la description d’un petit vaisseau construit à Brooklyn. Ce navire jauge seulement 70 tonneaux ; il a 30m,50 de longueur, 7m,62 de largeur et cale 1m,37. Sa machine se compose tout simplement de deux tuyaux de 3m,05 de longueur, placés parallèlement à l’arrière et sur chaque bord du bateau au-dessous de la ligne de flottaison, comme le seraient les arbres d’un navire à deux hélices. L’extrémité extérieure des tuyaux peut être fermée par une valve, tandis qu’à leur extrémité intérieure se trouve un « inspirateur ; » chaque inspirateur communique, d’une part, avec l’un des tuyaux, d’autre part, avec une caisse à pétrole ; ils servent à projeter dans les tuyaux quelques gouttes d’huile minérale sous forme de poussière très fine, et l’inflammation se produit à l’aide d’étincelles électriques provenant de batteries disposées à cet effet : voilà tout. Quand le navire est mouillé, les valves peuvent être ouvertes, et les tubes restent remplis d’eau sans inconvénient ; pour appareiller, on commence par fermer les valves et faire écouler l’eau dans la cale ; les tubes sont remplis d’air, l’inspirateur y projette sa poussière qui s’enflamme au contact de l’étincelle avec explosion ; les valves de l’arrière s’ouvrent en ce moment, l’air des tubes est refoulé avec violence vers l’arrière, et le navire avance. De nouveau, le tube se remplit d’air, nouvelle projection de poussière, nouvelle explosion, et ainsi de suite, à raison de 75 explosions par minute produites alternativement dans l’un et l’autre tube. Pour diminuer la vitesse, on diminue la quantité de pétrole fournie aux inspirateurs ; pour stopper, on supprime l’introduction du pétrole et on intercepte le courant électrique ; enfin pour reculer, on recourt à un système de tubes placés à l’avant et analogues à ceux que nous venons de décrire. Soixante ou soixante-cinq litres de pétrole et une petite batterie suffisent pour faire marcher le navire toute une journée avec une vitesse de 16 nœuds ; pour arriver au même résultat avec les machines ordinaires, il faudrait deux tonnes de charbon et une machine ayant un cylindre de 0m,305 de diamètre, et nous ne parlons pas ici des chauffeurs, graisseurs et soutiers dont le concours serait nécessaire.

Entre ce navire et les bateaux à pétrole de Bakou, il y a encore