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y a, en effet, entre les foires et les marchés voisins de la frontière, des relations constantes, avantageuses pour les populations des communes limitrophes, relations que le régime actuel laisse complètement libres. Le lait, le beurre, les œufs, les sacs de pommes de terre, etc., qui seront apportés ainsi sur nos marchés, seront-ils donc soumis à un droit de douane ? L’honorable rapporteur nous rassure en supposant que « l’administration des douanes fermera les yeux sur ces échanges internationaux, provoqués par les nécessités de l’alimentation. » Le bon billet ! Notre nouveau tarif, dans l’esprit de la commission qui l’a rédigé, ne comporte pas de tolérance, et les douaniers feront leur devoir. Secondaires en apparence, ces considérations sont de nature à frapper l’attention de la chambre, comme elles ont un moment arrêté celle de la commission. Pourquoi ne pas rayer du tarifées nombreux articles, dont quelques-uns sont minuscules ? Négligeons ces broutilles de la protection, cette salade de légumes et de fruits, frais ou secs, l’eau congelée, etc., dont le tarif ne produira que des vexations sans profit. Il ne s’agit, en définitive, que de maintenir pour ces articles le régime de franchise appliqué sans inconvénient depuis plus de trente ans.


III

Les industries textiles sont aux premiers rangs des industries nationales dont il importe d’assurer l’existence et la prospérité. Elles emploient de gros capitaux et un très grand nombre d’ouvriers ; elles doivent répondre aux besoins toujours croissans de la consommation générale ; elles alimentent des branches de commerce variées à l’infini et elles ont un rôle très considérable dans le commerce extérieur, soit par l’importation d’une partie des matières premières, soit par l’exportation des tissus, pour la fabrication desquels la France, au point de vue de la solidité et du goût, a su conserver jusqu’ici une incontestable supériorité. Elles méritent donc, sinon toutes les faveurs, du moins toutes les garanties que peut procurer un tarif de protection, garanties que, selon la commission des douanes, écho des intéressés, les tarifs de 1860 auraient enlevées à quelques-unes d’entre elles.

La législation de 1860 avait décidé l’admission en franchise de toutes les matières premières : coton, laine, soie, lin et chanvre, jute, etc. Les protectionnistes de 1891, dominés par l’intérêt agricole, auraient volontiers taxé toutes ces matières premières, même le coton. La commission des douanes ne s’est point laissé entraîner à ces mesures extrêmes. Elle a maintenu l’exemption pour le lin et le coton, avec résignation pour la laine, et non sans peine pour