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kilogrammes importés en 1890 ont pourvu à l’alimentation de 140,187 personnes, qui ont réalisé ensemble une économie de 2,558,412 fr. 75. D’après le rapport, ce bénéfice, dont profitent exclusivement nos populations de l’extrême frontière, serait compensé par une perle de 1,200,000 ou de 1,500,000 francs, représentant les droits que la douane aurait perçus si, au lieu de pain, l’on avait importé le blé ou la farine, puis par une perte de 2 millions 800,000 francs qui auraient été dépensés sur le sol national et gagnés par nos industriels et nos ouvriers, si le pain venu de Belgique avait été fabriqué en France. Les recettes de la douane ont en effet subi une diminution, mais il ne semble pas exact de considérer comme une perte sèche la réduction signalée dans le travail de la boulangerie : il y a là plutôt un déplacement de capital et de main-d’œuvre, déplacement qui peut être dommageable pour des intérêts particuliers, mais qui n’affecte pas le travail national, surtout dans le département du Nord, où capital et main-d’œuvre trouvent largement à s’employer.

Ce qui est important, et ce qu’il faut retenir, c’est que d’après les calculs mêmes du rapport, les droits sur le blé et sur la farine font supporter annuellement aux consommateurs français, comparés avec les consommateurs belges, qui ne sont grevés d’aucun droit, une différence de 18 fr. 25 par tête pour le prix du pain. C’est énorme, particulièrement dans le département du Nord, où les familles sont nombreuses. En appliquant ces calculs à notre population de 38 millions d’habitans, on arriverait au chiffre de 693 millions de francs représentant la surcharge que les tarifs actuels infligent à la nation pour la consommation du pain. Oui, surtaxez le pain, quintuplez le droit actuel, la logique vous y condamne ; mais ne venez plus soutenir que le droit sur le blé est inoffensif, que la protection n’a pas fait hausser les prix, que la population française ne paie pas son

La plupart des légumes secs ou farineux alimentaires étaient admis en franchise complète, les pois, les fèves, les haricots, les lentilles, les pommes de terre, les marrons, les châtaignes, etc. Tout cela désormais serait taxé, si la chambre adoptait les propositions de la commission. Des droits qui ne représentent pas moins de 6 pour 100 de la valeur et qui vont parfois à 12 et 14 pour 100, frapperaient ces divers produits agricoles. Le rapport nous initie aux luttes qui se sont engagées dans la commission, sur cette partie du tarif. « La question du droit à établir sur les haricots a donné lieu à une longue discussion. » Les agriculteurs du Nord demandaient 8 francs, d’autres 5 francs. La commission a reconnu « qu’un droit trop élevé rendrait assez difficiles nos relations commerciales avec