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eu lieu dans la période où le corps se forme, leur constitution en a ressenti les bénéfices principaux. Et il arrive souvent que, plus tard, le moindre trouble de la santé est le prétexte d’un retour à la gymnastique. Mais celle-ci est appliquée alors dans un autre esprit et prend une autre forme, dont il nous restera à parler ; elle devient la gymnastique médicale.

Le plus grand reproche qu’on puisse faire au système suédois, c’est qu’il ne comporte aucun exercice de plein air. Tout le travail se fait dans de grands gymnases clos et couverts, et l’institut de Stockholm n’a pas, comme notre école de Joinville, un stade à l’air libre, où l’on puisse s’exercer les jours de beau temps. C’est là une lacune qui suffirait, au point de vue de l’hygiène, à faire condamner le système, si le sport d’hiver, si populaire à Stockholm, ne venait très heureusement la combler.

Nous ne pouvons nous figurer, en France, quelle animation apporte le froid dans la vie des peuples Scandinaves. Le « triste hiver » est pour eux l’occasion des amusemens les plus variés. L’atmosphère est généralement très pure, à Stockholm, et un air bien sec, à la température de 15 à 20 degrés, produit sur le système nerveux la même excitation qu’un verre de Champagne. Le besoin de mouvement devient alors très impérieux, et la neige et la glace fournissent bien des prétextes pour le satisfaire. Le patinage est, naturellement, fort en honneur à Stockholm, et les lacs, les canaux et les rivières qui occupent une si vaste étendue du territoire suédois permettent d’en faire un moyen de locomotion des plus rapides, en même temps qu’un sport des plus attrayans. On voit des jeunes gens qui partent en touriste, le sac au dos, pour faire avec leurs patins des voyages de 300 à 400 kilomètres. Dans toutes les classes de la société, les femmes patinent, avec le même entrain que les hommes, et je tiens d’une dame de Stockholm ce détail, qu’on ne pourrait garder une femme de chambre, si on ne lui permettait de se réserver, chaque semaine, un certain nombre d’heures pour aller sur la glace. Les enfans des deux sexes prennent le patin dès l’âge de cinq ans, et tout Suédois serait honteux de ne pas connaître cet exercice tout à fait national, auquel les troupes s’exercent avec armes et bagages le long des îles de la Baltique.

Mais le sport d’hiver prend beaucoup d’autres formes. C’est d’abord la skida, immense patin de bois, large de dix centimètres seulement, et long de 1m,50, recourbé « à la poulaine » par chacun de ses bouts. Cet engin est destiné à glisser, non sur la glace, mais sur la neige. Le sportsman engage l’avant-pied dans une simple bride en cuir ou en corde placée au milieu de la skida,