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33,000 francs annuellement destinée aux anciens pensionnaires, peintres, sculpteurs et architectes, put être pour la première fois répartie entre les ayans-droit[1]. Chacun d’eux depuis lors a joui régulièrement du bénéfice de la fondation de Caen ; en sorte que, pendant les trois années qui suivent celle où ils ont quitté Rome, les anciens pensionnaires, grâce aux dispositions si libéralement prises en leur faveur, se trouvent affranchis de cette obligation à laquelle leurs devanciers n’avaient que bien rarement pu se soustraire, de chercher des moyens immédiats d’existence dans des travaux de rencontre et non dans des travaux de leur choix. Les peintres d’histoire, au lendemain de leur retour de Rome, n’ont plus à craindre un sort pareil à celui de Léon Cogniet qui, une fois à Paris, en était d’abord réduit pour vivre à crayonner, en attendant mieux, des lithographies pour les marchands. Les sculpteurs peuvent, dès le commencement de leur séjour ici, travailler à des œuvres qu’ils signeront de leurs noms, au lieu de se voir, comme cela arrivait trop souvent autrefois, dans la nécessité d’accepter pour un temps le rôle de simples auxiliaires d’autrui. Enfin, les architectes eux-mêmes trouvent dans les ressources que la fondation leur fournit les moyens de confirmer par de nouveaux ouvrages dessinés les preuves de talent antérieurement données et, pour ainsi parler, d’achever en paix le stage au terme duquel ils quitteront leurs cabinets de travail pour les chantiers.

D’ailleurs, soit dit en passant, des cinq classes d’artistes entre lesquelles, en dehors de la fondation de Caen, l’Académie est chargée de répartir les produits de diverses fondations particulières, celle des architectes est en réalité mieux pourvue qu’aucune autre. Le nombre des prix ou des encouragemens qui lui sont destinés ne s’élève pas aujourd’hui à moins de dix, tandis que neuf seulement doivent être décernés à des peintres, six à des sculpteurs, cinq à des compositeurs de musique et trois à des graveurs en taille-douce ou en médailles. Il serait inutile sans doute d’entrer ici dans le détail des conditions que comportent ces diverses fondations, dues pour la plupart à des artistes ou à des membres de leurs familles. Il en est une toutefois dont l’origine toute particulière mérite au moins d’être indiquée : c’est celle qui depuis l’année 1877 permet à chacun des vingt-cinq concurrens aux grands prix de pointure et de sculpture de recevoir des mains de l’Académie, au moment même de son entrée en loge, sa part

  1. Conformément aux volontés de Mme la comtesse de Caen, les peintres et les sculpteurs reçoivent chacun pendant trois ans une pension de 4,000 francs, les architectes une pension de 3,000 francs.