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qui, sans avoir été directement formés par lui, se ressentaient plus ou moins de l’influence qu’il avait exercée. Maintenant, c’est-à-dire parmi les peintres entrés à l’Académie depuis 1830, trois seulement, — MM. Drolling, Abel de Pujol et Picot, — continuaient, sans s’y asservir d’ailleurs et chacun à sa manière, la tradition fondée par le peintre de la Mort de Socrate et des Sabines. Avant d’accorder ses suffrages à ces « classiques » de la dernière génération, l’Académie avait appelé à elle d’autres peintres « d’histoire, » mais d’une histoire fort étrangère à l’antiquité. grecque ou romaine : Paul Delaroche, par exemple, élu dès 1832 à la suite des expositions où avaient figuré ses tableaux de la Mort d’Elisabeth et de la Mort du président Duranti, de Richelieu et de Mazarin, des Enfans d’Edouard et de Cromwell. Dans des genres secondaires si l’on veut, mais qu’en tout cas personne avant eux ne s’était avisé de traiter, deux autres nouveaux venus à l’Académie, riches d’ailleurs d’un passé déjà long, Schnetz et Granet, représentaient, le premier la robuste sincérité dans la transcription des scènes rustiques italiennes, le second le sentiment original et profond des effets pittoresques produits, à l’intérieur des monumens, par les contrastes de l’ombre et de la lumière. Enfin si l’unique place réservée dans l’Académie à la peinture de paysage restait occupée depuis vingt-cinq ans par M. Bidault, en qui se personnifiaient L’art de convention et les doctrines surannées des anciens émules de Valenciennes, le moment était proche où l’Académie, en lui donnant pour successeur M. Brascassat, se montrerait ouvertement favorable au mouvement des idées et, — bien que le mot n’eût pas cours encore à cette époque, — au naturalisme de bon aloi qui tendaient à régénérer notre école de paysage.

Tout en n’étant pas aussi variés peut-être que dans la section de peinture, les talens réunis dans les autres sections n’en contribuaient pas moins, chacun par sa physionomie propre, à rompre l’uniformité qu’avait pu donner naguère à l’ensemble du corps la communauté des origines et des habitudes ; mais ces différences individuelles n’avaient nullement eu pour conséquence d’introduire dans le sein de l’Académie des divisions analogues à celles qu’entretenaient ailleurs les mécontentemens ou les ambitions des partis. En un mot, il n’y avait à l’Académie ni une gauche, ni une droite ; il n’y avait, comme il n’y a encore aujourd’hui, que des hommes travaillant, avec des aptitudes diverses, soutenir ensemble la cause de l’art et à en encourager loyalement les progrès sous toutes les formes. Quelque dissemblables au fond que pussent être les doctrines d’Ingres et les instincts d’Horace Vernet, le style des sculptures de. David d’Angers et celui de l’architecture de Huyot ou