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Archives publiques du Cher. On y lit, en 1790 : « J’ai promis 72 livres pour le don patriotique, payable en trois ans. » En 1791 : J’ai payé 24 livres pour le deuxième tiers de mon don patriotique. » En 1792 : « J’ai été remplacé, n’ayant pas prêté le serment que demandait la constitution civile du clergé, ni ne l’ayant voulu faire ; on m’a donné pour ma pension 500 livres par an. » A la date du 1er octobre de la même année, le journal continuait ainsi : « Je suis à Bourges, à la maison Saint-François, où tous les prêtres qui n’avaient point prêté le serment qu’on demandait ont été renfermés, par ordre de l’assemblée de la nation, que l’on nomme MM. les citoyens de la Convention de Paris. Nous sommes environ cinquante… »

Quand la paix se fit, on ne parut plus se souvenir de ce dogme de l’ère nouvelle : l’indépendance réciproque de l’État et de l’Église. On ne se borna pas à rendre au clergé les bâtimens qu’on lui avait pris, à lui assurer une pension alimentaire en dédommagement des biens « qu’on lui avait confisqués ; les rapports anciens furent renoués sous la forme diplomatique ancienne, si invétérée qu’on n’en imaginait pas d’autre, qu’on ne se figurait pas de moyen terme entre la haine brutale ou la convention scellée de cire rouge. Le premier consul stipulait des prières obligatoires, des sermens, — lui qui devait savoir déjà ce que vaut un serment civique, — il chaussait les pantoufles de Louis XVI, déclarait « faire une profession particulière du culte catholique, » et, en récompense de sa dévotion, se réservait la nomination des évêques et à peu près celle des curés, sans parler de la désignation des six cardinaux français, — vieille « promotion des couronnes », — dont il devait jouir en vertu « des droits et prérogatives de l’ancien gouvernement, » qui lui étaient expressément reconnus.

La trace de la révolution était-elle donc effacée ? Non pas, car ce document de chancellerie portait lui-même sa rade empreinte : deux points, deux articles de ce concordat auraient fait bondir Pithou et Dupuy, ces athlétiques champions de l’église gallicane, doux articles si importans qu’ils rendaient à eux seuls l’ensemble de la transaction nécessaire, — au point de vue de l’Etat, — mais si hétéroclites, — au point de vue de l’Église, — qu’ils bouleversaient toutes les idées admises et tous les précédens ecclésiastiques : le premier, c’est la reconnaissance par le pape de la confiscation des biens du clergé, la quasi-investiture donnée par lui aux nouveaux acquéreurs ; le second, c’est la déposition, en termes aussi mitigés et aussi obligeans que possible, mais enfin la déposition pure et simple de tous les anciens évêques. Cette mesure avait coûté beaucoup au souverain pontife ; elle lui avait paru si audacieuse, si contraire à toute la discipline, à toutes les lois de