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La sotte contenance !
Ah ! quelle heureuse chance
D’avoir un sot et benêt de mari
Tel que celui-ci !


Cependant, Marie de La Vergne ne se laissa pas rebuter


La belle, consultée
Sur son futur époux,
Dit dans cette assemblée
Qu’il paraissait si doux
Et d’un air fort honnête,
Quoique peut-être bête ;
Mais qu’après tout pour elle un tel mari
Était un bon parti.


Le futur époux se trouva donc agréé, sans enthousiasme, à ce qu’il semble, et le mariage fut célébré à Saint-Sulpice le 15 février 1655. La duchesse d’Aiguillon, l’ancienne protectrice du père de Marie de La Vergne, Mme de Sévigné, sa meilleure amie, signèrent au contrat, et la Muse historique de Loret annonçait la nouvelle à ses lecteurs en des termes dont les gazetiers de nos jours ne se permettraient pas d’imiter la crudité.


La Vergne, cette demoiselle A qui la qualité de belle Convient très légitimement, Se joignant par le sacrement A son cher amant La Fayette, A fini l’austère diète Que, dût-elle cent fois crever, Toute fille doit observer.


Peu de temps après, M. de La Fayette emmenait sa femme en Auvergne, et ce départ laissait un grand vidé dans la petite société où elle avait jusque-là vécu. Mme de Sévigné fut une des plus aflectées de ce départ et sa douleur devint assez publique pour être mise en vers et en musique dans une romance italienne dont l’auteur la fait parler ainsi :


Or ch’ il canto non godo
Dell’ angel mio terreno,
Or ch’ altro suon non odo
Che dei mesti sospir ch’ esala il seno,
Deh ! per che mi ai nega, o sorte ria,
Di spirar fra i sospir l’anima mia.