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des chemins de fer et des téléphones électriques, le taux de l’intérêt serait descendu à 1 pour 100 dans les pays d’outre-Manche. M. Paul Leroy-Beaulieu, dans son Essai sur la répartition des richesses, a démontré la baisse graduelle du taux de l’intérêt par suite de l’accumulation de capitaux disponibles. À moins de guerres destructives, l’épargne, de plus en plus abondante, aura abaissé à 3 pour 100 le revenu des placemens sûrs vers la fin du siècle actuel. Un taux plus élevé est inadmissible pour l’institution de l’assurance contre l’invalidité en Allemagne d’ici cinquante ans seulement.

Une fois l’insuffisance des ressources constatée sous l’effet du fonctionnement des offices d’assurance, les cotisations des assurés pourront être augmentées sans trop de peine à cause de la hausse probable des salaires. Plus difficile deviendra la situation des invalides pensionnés par suite de la diminution du pouvoir de l’argent, dont l’expérience nous oblige à tenir compte. Dans les conditions actuelles, la rente annuelle de 106 marcs, accordée aux vieillards assurés dans la classe la plus basse, ne suffit pas pour l’entretien d’un individu vivant seul. Les secours accordés aux indigens invalides par l’administration de l’assistance publique à Elberfeld atteignent aujourd’hui 3 marcs par semaine ou 156 marcs par an. C’est sensiblement plus que la moyenne des rentes de vieillesse avec l’assurance obligatoire, moyennant des contributions annuelles de 6,58 à 14,10 marcs, à verser depuis l’âge de seize ans jusqu’à soixante-dix ans par les ouvriers assurés. Avons-nous besoin, dès lors, de formuler la conclusion qui découle naturellement des faits par la comparaison des deux cas ? Du moment où l’ouvrier prévoyant, celui qui, pendant toute sa vie laborieuse, porte chaque semaine ses contributions à la caisse de retraite, doit toucher une rente inférieure au montant des secours accordés, en vertu de la loi, au sujet imprévoyant tombé dans la misère, sans s’être imposé la moindre privation pour réaliser quelques économies pour ses vieux jours, la masse des prolétaires ne considérera pas les caisses de retraite, ainsi organisées, comme un bienfait social. Voici d’ailleurs comment l’institution nouvelle se résume en chiffres :

Classes d’assurance Première Deuxième Troisième Quatrième





Salaire annuel en marcs Jusqu’à 350 De 350 à 650 De 650 à 850 De 850 et plus
Contribution hebdomadaire 0,14 0,20 0,24 0,30
Rente de vieillesse par an 106,40 134,60 162,80 191,00
Rente d’invalidité minimum 114,70 124,10 131,15 140,35
Augmentation par semaine 0,02 0,06 0,09 0,13
Rente d’invalidité maximum 138,20 194,60 236,90 293,30