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Mais les puits artésiens de la Tunisie, créés également sur une très grande étendue dans le sud algérien par la société de ce nom et la compagnie de l’Oued-Rirh, seraient insuffisans dans les chotts du Djérid et ne feraient pas que l’exportation des dattes se fût élevée, depuis 1886, à plus de 600,000 francs, si les cultivateurs tunisiens, qui, depuis quelque temps, lui préfèrent la culture des oliviers, n’avaient de belles et nombreuses oasis où les palmiers poussent et prospèrent sans grand labeur.

L’oasis de Gabès est un admirable jardin ; là, à l’ombre des palmes, les arbres à fruit du sud de l’Europe croissent admirablement. La vigne y pousse, enlaçant les dattiers de ses souples sarmens ; à la saison des vendanges, les raisins en descendent sous forme de belles grappes dorées que l’on cueille debout et à la main. Le charme de cette oasis de Gabès est d’autant plus séduisant qu’elle touche aux solitudes sahariennes, qu’une ceinture de sable fin l’entoure et que la mer, une mer d’un bleu méditerranéen, est proche et lui prodigue ses brises rafraîchissantes. Par malheur, lorsque l’été n’est pas exceptionnellement chaud, les dattes n’arrivent pas à une maturité complète ; des fièvres causées par le manque d’une eau bonne à boire détruisent aussi souvent la santé, et ruinent les forces des Européens qui vont s’y établir.

A 30 kilomètres de cette ville, l’on trouve l’oasis d’El-Hamma, où 70,000 palmiers sont en culture. Puis viennent les oasis de Zarzis et de Djerba; mais là, comme à Gabès, un chaud soleil manque aux fruits et l’eau limpide à l’homme.

Il est une région au sud de la Tunisie, appelée Nefzaoua, très riche en oasis. Dans la partie méridionale, on en compte jusqu’à trois cents, et, dans la partie septentrionale, elles occupent une étendue de 40 kilomètres. Le chiffre des dattiers qui s’y cultivent est évalué au minimum à 300,000. Ils sont constamment menacés d’être envahis par les sables mouvans ; les indigènes réussissent tant bien que mal à s’en préserver en établissant des canaux sous les monticules dorés que forment les dunes. C’est un travail qui fait le plus grand honneur à ceux qui ont eu l’heureuse idée de le mettre en pratique. Les dattes de la Nefzaoua sont excellentes, car presque toujours elles atteignent à la maturité voulue. Si elles n’ont pas la célébrité de celles de Djérid, c’est parce qu’elles s’exportent peu et sont consommées sur place.

Une carte, même une carte réduite de la Tunisie, vous signalera tout de suite l’isthme qui, placé entre le chott Rharsa et le chott El-Djérid, porte ce dernier nom. Les oasis y sont nombreuses, mais les plus riches et les plus belles sont celles de Nefta, de Tozeur et d’El-Oudian. La population réunie de ces trois groupes