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Bible, ayant soin, en l’interprétant, d’écarter le sens mystique et de dénaturer souvent le sens littéral. C’est une peine perdue. L’étude impartiale des documens bibliques amène à ce résultat : les paroles des voyans n’ont pas de justification plus parfaite que l’histoire même de Jésus; elles n’ont leur sens plein qu’en lui. Elles dépassent toujours le premier plan qu’elles dessinent, et elles révèlent à l’arrière-plan qui domine tout, le Messie et son œuvre tels que Dieu, dans sa providence insondable, les préparait depuis l’origine des temps et des choses.

La religion, enseignée par Jésus et réalisée en lui, embrasse dans sa vitalité puissante l’humanité entière. Elle est comme un grand livre d’histoire en deux volumes. L’un contient la prophétie de ce qui doit être; l’autre, le récit des événemens prophétisés. L’Esprit de Dieu seul a pu écrire le premier; seul, il a pu réaliser ce que contient le second et permettre à des hommes de le comprendre et de le raconter. Les deux volumes sont ouverts à tous les yeux. Il n’est plus au pouvoir de personne de les falsifier. Si les chrétiens attentaient au premier, les Juifs élèveraient des quatre coins du monde une protestation ; et si les hérétiques ou les païens modernes voulaient attenter au second, l’Eglise, qui remplit l’humanité, se soulèverait pour sauvegarder ses Évangiles.

Voilà les deux grands témoignages de Dieu. Il apparaît ainsi maître des temps, puisqu’il les annonce bien avant qu’ils ne soient, et puisqu’il les fait arriver comme il les avait annoncés par la voix des prophètes.

Nulle critique, nulle exégèse, nul système, nulle incrédulité n’aura raison de cette œuvre colossale ; mais Dieu se plaît, dans ses rapports avec l’homme, à confondre la vaine sagesse qui se prévaut contre lui et à dédaigner cette culture qui, sous le nom de science et de philosophie, s’acharne à démolir son œuvre. L’œuvre subsiste, impassible et grandissante, étonnant ceux qui se brisent contre elle et ralliant à sa lumière les simples, les souffrans, les humbles, et même les grands esprits, pour peu qu’ils renoncent à mesurer Dieu et s’appliquent à l’aimer.


X.

Si la prophétie existe, — et l’on a vu avec quelle puissance historique elle s’impose à l’esprit sans prévention, — pourquoi le miracle n’existerait-il pas? S’il existe un Jésus prophétisé, pourquoi pas un Jésus thaumaturge?

Je pose la question non au panthéiste, au matérialiste, au positiviste, au sceptique, à l’incroyant, au croyant; je l’adresse à l’homme. Avant d’être ralliés à un système ou à une croyance.