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la conscience de ses fidèles : voilà son témoignage, son monument indestructible.

L’Église, fondée par lui, remplit de son nom les temps et l’espace. Elle le connaît, elle l’aime, elle l’adore ; comme il vit en elle, elle vit en lui. Il est son dogme, sa loi morale, son culte. Elle enseigne à tous, sans distinction, sans exception, qu’il est le Fils unique de Dieu fait homme, conçu du Saint-Esprit dans les entrailles de la Vierge ; qu’il est venu en ce monde souffrir et mourir pour nous sauver, vaincre la mort par sa résurrection ; qu’il est remonté à son Père, afin de nous préparer la place près de lui ; qu’il reviendra juger les vivans et les morts, donnant aux bons la vie éternelle, repoussant les mauvais dans les ténèbres et dans la mort de l’âme.

Ce Credo est tout à la fois un précis dogmatique et historique, le dogme et l’histoire populaire de Jésus. Le croyant peut en vivre. En quelques mots simples et profonds, il apprend que le plus grand événement de l’humanité est la venue du Christ ; que Dieu l’aime, puisque Dieu veut le sauver du mal et se donner à lui ; que la charité est le devoir suprême, puisque c’est par amour que son Maître est mort ; qu’il doit être vigilant dans le bien, puisque son Maître sera son juge ; qu’il n’a pas à redouter la mort, puisque son Maître l’a vaincue et qu’il est destiné lui-même à l’éternelle vie.

L’homme qui croit à cet enseignement et à ce Christ peut marcher dans a vie ; il est armé pour s’y défendre et pour y grandir. Rien n’arrêtera sa croissance. Le disciple de Jésus est devenu le souverain du monde, non pas au point de vue matériel et brutal, — La violence n’est pas dans l’esprit de son Maître crucifié, — mais au point de vue de la justice, de la bonté, de l’abnégation, du sacrifice et de la dignité morale. En semant ces vertus comme des germes de vie, il prépare et enrichit le sol humain, qui devient capable de toutes les cultures, de toutes les moissons.

Mais, de même que la raison de ceux qui pensent cherche l’intelligence des dogmes élémentaires ; demande qu’on les lui explique, dans la mesure de nos connaissances imparfaites et toujours limitées ; exige qu’on repousse les attaques d’une philosophie, d’une science ou d’une littérature hostiles ; de même, elle aspire à connaître, dans le détail, la vie humaine et divine de Jésus, les paroles qu’il a dites, la loi qu’il a formulée, sa manière d’enseigner, d’évangéliser, de lutter, de souffrir et de mourir.

L’histoire de Jésus est le fondement de la foi. Doctrine évangélique, théologie, morale chrétienne, culte, hiérarchie ou Église, tout repose sur elle. Grâce au travail incessant des docteurs, la doctrine de Jésus, sa morale, son culte et son Église sont devenus peu à peu l’objet de sciences distinctes, parfaites, organisées,