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l’état de prospérité et de richesse de notre pays, il semble que le chiffre moins élevé de la dette anglaise et surtout la régularité avec laquelle il décroît chaque année, justifieraient entre les deux fonds une différence de capitalisation supérieure à l/12e pour 100. Enfin, la brusquerie de la hausse qui a été faite sur notre fonds national, le défaut même d’interruption dans le mouvement, tout accuse à la fois et la part considérable de la spéculation pure dans cette campagne si brillante et le puissant concours qu’elle a trouvé dans les achats continus pour le compte des caisses d’épargne. Si l’on songe que dans peu de mois, avant peut-être la fin de l’année, il va être créé pour 700 millions de francs d’inscriptions nouvelles de rente 3 pour 100, il est difficile de ne pas trouver au moins très hardi, pour ne pas employer une expression plus forte, le dessein si habilement poursuivi de porter notre principal fonds national à 100 francs. On a émis l’idée que le gouvernement devrait profiter de la faveur extraordinaire dont bénéficie le crédit du pays, pour émettre le prochain emprunt non en 3 pour 100, mais en un nouveau fonds 2 1/2 pour 100 que l’épargne publique se disputerait au prix de 80 francs et que la spéculation porterait sans peine au-dessus de 90 fr., ce qui pousserait l’ancien 3 pour 100 par-delà le pair et permettrait de le convertir à son tour en 2 1/2 pour 100, pour le plus grand allégement des charges du Trésor. Ce sont là de beaux projets, dont la réalisation n’est peut-être pas aussi lointaine qu’on pourrait l’imaginer. Pour l’instant, du moins, ils sont prématurés. Il faut songer à l’incident imprévu, au grain de sable qui produit l’écroulement des plus séduisantes combinaisons.

Les places étrangères ont en général conformé leur attitude à celle de notre marché. La quinzaine a été encore pour quelques-uns des fonds d’États, objets de la spéculation internationale, une période de progression sérieuse. L’Autrichien or 4 pour 0/0 a été porté de 97.50 à 98.35, l’Extérieure de 77.25 à 78.15, le 4 0/0 russe 1889 de 98.70 à 99, le 1890 de 99 à 98.35 ex-coupon de 1 0/0, le Consolidé de 99 à 99.25, le 4 1/2 Brésilien de 89.25 à 92, le 4 0/0 de 81.75 à 83.

Cependant le Hongrois a reculé de 92.25 à 91.75 ; l’Italien, porté d’abord de 96.15 à 96.60, a reculé à 95.80, pour revenir à 96.10. Le Portugais se retrouve à 63.75, comme il y a quinze jours, après une pointe à 64.50 ; l’Unifiée est restée sans changement à 495, de même le Turc à 19.75.

Dans l’ensemble, on constate une difficulté réelle à dépasser le niveau déjà atteint. Dès qu’un de ces fonds s’élève d’une fraction notable, les réalisations affluent et le ramènent en arrière. L’opportunité d’un temps d’arrêt est manifeste. Les 4 0/0 russes devront reculer sans doute avant de franchir la courte étape qui les sépare du pair. Sur