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perspective excellente. On peut dire aussi, à leur louange, qu’elles sont d’un sentiment très décoratif. Dans toutes, l’effet, quoique varié, présente bien la clarté flottante des grands intérieurs, sans aucune affectation dans les oppositions de la lumière et de l’ombre. Enfin, il règne dans ces tableaux un air d’aisance et de sécurité qui dénote un peintre en pleine possession de son talent, un artiste qui a trouvé sa voie, un homme heureux.

Heureux, M. Alaux l’était en effet. Il avait contracté une union qu’il avait longtemps désirée, et il semble que l’on retrouve, parmi les jeunes femmes qui occupent les tribunes des États de 1614, l’image de sa charmante compagne. Les tableaux des États généraux obtinrent un grand succès et furent loués comme ils méritaient de l’être. A la vérité, quelques critiques qui, jusque-là, avaient attaqué l’artiste avec persistance, crurent pouvoir, cette fois, le passer sous silence. Mais il eut pour lui tout le monde, et nul doute que, si une place eût alors vaqué à l’Académie des Beaux-Arts, il n’eût été appelé à l’occuper.

Le roi Louis-Philippe suivait avec un intérêt très vif les travaux destinés aux galeries de Versailles. Il veillait à la rédaction des programmes et faisait faire les recherches nécessaires à leur exécution. Il accorda une attention particulière aux États généraux. M. Alaux, pour les peindre, s’établit dans les combles du Louvre, en face de l’Institut. Les renseignemens ne lui manquaient pas : c’étaient des gravures et c’étaient des textes. Souvent ces autorités venaient lui donner tort et contredire ce qu’il avait cru pouvoir imaginer. De là des retouches fréquentes, mais aussi des modifications qui, tout au moins, tournaient à l’honneur de la vérité. Le roi venait voir les tableaux et faisait ses observations. Cela se produisit à propos de l’Assemblée de 1596. M. Alaux y avait introduit une tenture rouge. Un jour, le roi apporta la preuve que la salle était tendue de bleu. Chagrin de M. Alaux ! « Mais, disait-il plus tard, une fois le changement opéré, je trouvai que mon tableau faisait mieux. » A la suite du Salon de 1841, M. Alaux reçut la croix d’officier de la Légion d’honneur. À cette occasion, le roi lui dit : « C’est moi qui y ai pensé. »

Au souci des choses de l’histoire, que l’on avait en haut lieu, répondaient aussi des actes administratifs. Le service des monumens historiques avait la charge de conserver nos édifices nationaux et de les restaurer. L’intendance générale de la liste civile entreprit de veiller également sur les œuvres d’art et de les sauver de la destruction quand le temps et les hommes les auraient mises en péril. Aucunes n’étaient plus compromises que celles qui servaient à la décoration du palais de Fontainebleau. Pendant les deux règnes précédens, Fontainebleau avait été négligé : il avait eu, sous