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moyens qu’on mette en usage à Berck-sur-Mer. Comme les malades qu’on y envoie sont pour la plupart très gravement atteints et qu’ils y restent jusqu’à ce qu’ils soient guéris ou reconnus définitivement incurables, on est obligé de recourir à toutes les ressources de la thérapeutique. Le docteur Cazin y pratique une chirurgie aussi active qu’efficace et dont on peut juger par la statistique suivante que j’emprunte à son livre[1] :

De 1869 à 1882, il est entré à l’hôpital de Berck 4,692 scrofuleux des deux sexes. Il en est mort 339 ; 3,321 sont sortis guéris. Cet heureux résultat a souvent été acheté au prix d’une mutilation, car près de la moitié de ces jeunes sujets, 2,242, ont dû subir des opérations plus ou moins sérieuses. La gravité des cas est, du reste, attestée par la longue durée du séjour à l’hôpital. Elle a été de 423 journées en moyenne.

Le docteur Cazin est admirablement secondé par les sœurs du tiers-ordre de Saint-François qui sont attachées à l’établissement depuis sa fondation. Elles y sont au nombre de 75, et c’est sur elles que tout le service repose. Ces femmes dévouées ne quittent pas les enfans. Elles les habillent, les baignent, les pansent et trouvent encore le temps de donner des soins aux malades du dehors.

L’hôpital de Berck, malgré les succès qu’on y avait obtenus, n’avait pas fait école. Les millions dépensés par l’administration de l’Assistance publique avaient même découragé l’initiative privée. Aussi, pendant de longues années, cette fondation ne trouva pas d’imitateurs. Il y avait onze ans que le grand hôpital de Berck était en service, lorsque Jean Dollfus, ancien maire de Mulhouse, et M. Friedland fondèrent, le premier à Cannes et le second à Nice, les deux petits hôpitaux qui portent leur nom.

Le premier, construit en 1882, ne contenait primitivement que quinze lits ; mais en 1886, Jean Dollfus fit l’acquisition de l’ancien hôtel Brougham et put y loger trente petits scrofuleux. Le nombre en a été porté depuis à 45 dont 15 sont envoyés de Genève par le bureau de bienfaisance de cette ville. Les autres viennent de Paris et de Mulhouse. Tous les lits sont constamment occupés. Ce sanatorium est très bien disposé. Les enfans y séjournent du 1er octobre au commencement de juin. L’établissement est alors fermé jusqu’à la fin de septembre, parce que la saison d’été est trop chaude et la diarrhée trop fréquente chez les enfans pendant les mois caniculaires.

Les bains de mer sont donnés aux petits malades depuis leur retour jusqu’à la fin de novembre ou au commencement de

  1. H. Cazin. De l’influence des bains de mer sur la scrofule des enfans. Ouvrage couronné par l’Académie de médecine (Prix Capuron 1883). Paris, 1885.