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Nous voulons parler ici des produits courans de la campagne : lait, beurre, fromage, œufs et volailles, animaux domestiques et toisons, qui, selon le degré de l’intelligence et de l’activité déployées par la fermière, constituent, sur ce domaine intérieur dont elle est maîtresse, une force vive et continue de la colonisation. Pour le moment, nous nous bornerons à indiquer les chiffres de cette production générale, nous réservant de revenir plus loin et plus utilement sur les qualités ou les défauts du fermage américain. Ces chiffres, d’ailleurs, sont très importans.

Dès 1850, le nombre des vaches s’élevait sur tout le territoire fédéral, moins vaste qu’à cette heure, à 6 millions de têtes : en 1880, malgré les déprédations de la guerre de sécession qui avaient dévoré une partie du gros bétail, il s’était accru de moitié. Enfin, le dernier recensement de 1889 accusait 16 millions de vaches, y compris celles des villes.

La valeur numéraire de la vache laitière diffère, dans de grandes proportions, selon les différens états de l’Union. Ainsi, dans le Colorado, pays de la « région aride, » le prix de cet animal s’élève en moyenne à 39 dollars 12 cents ; plus de 200 francs ; c’est le maximum de tous les États ; tandis que dans le Mississipi et l’Alabama, il s’abaisse à une moyenne de 15 dollars, soit 75 francs : c’est le minimum. La valeur correspondante de chaque tête, non laitière, de gros bétail dans ces états offre une moins-value fort sensible : dans le Colorado, en effet, la moyenne est de 24 dollars 36 cents ; dans ceux du Mississipi et de l’Alabama, elle ne dépasse pas 9 dollars 66 cents.

En ce qui touche la race chevaline, bêtes de trait ou de selle, la moyenne du prix d’un cheval varie entre le maximum de 94 dollars 30 cents, état du Mairie, et un minimum de 32 dollars 17 cents, état du Texas. On peut ajouter que la race américaine, qui mêle son sang surtout à celui de notre race normande et qui compte déjà à son actif les victoires multiples de son grand vainqueur Foxhall, possède des qualités exceptionnelles de grandes allures au trot.

Examinons maintenant ce que rapporte cet immense troupeau nourricier de vaches laitières aux États-Unis. Quant au lait, c’est inappréciable, par suite de l’incurie générale des éleveurs. La plupart des fermiers se contentent de la consommation journalière. Le reste de la production laitière, excepté autour des grands centres, reste souvent inutilisé, même pour l’engrais des animaux. Et encore auprès des villes, faute d’initiative et d’organisation, ce n’est pas le producteur qui en retire le véritable bénéfice. Ainsi, dans les rayons de New-York et Chicago, ce sont encore les middlemen (courtiers et intermédiaires), qui courent à l’aventure de ferme