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8Ù2 REVUE DES DEUX MONDES. PIERRE. Des douleurs de tête, là, par derrière. MEYNARD. Excès de travail! Je t’avais prévenu. Tu as trop exigé de ton cerveau; ton cerveau se venge : c’est dans l’ordre... Donne seule- ment un peu de repos à l’organe. PIERRE. Est-ce que je peux lui en donner!.. Il refuse d’en prendre. MEYNARD. Comment cela? PIERRE. Eh ! oui. . . parbleu ! C’est bien là ce qui m’épuise. . . Jour et nuit, je pense, je pense, je pense... C’est afïreux!.. Et cette sorte de fonc- tionnement automatique de mon cerveau, que je ne puis suspendre ni même ralentir, a quelque chose de déréglé qui m’épouvante... Figure-toi une usine dans laquelle tous les rouages tourneraient, ceux-ci dans un sens, ceux-là dans un autre, sans moteur princi- pal, sans force directrice, dans le vide, au hasard. Eh bien, mon ami, c’est exactement ce qui se passe dans ma pauvre tête. MEYNARD. C’est bizarre!.. Depuis quand, tout cela? PIERRE. Ah! mon ami, depuis quand?.. Tu le demandes?.. Depuis ce maudit, cet incompréhensible accident!.. MEYNARD. Comment, incompréhensible?.. Le froid t’avait saisi, une conges- tion du rein s’est déclarée... PIERRE. Bon pour les femmes, ces explications-là! MEYNARD. Alors, quoi? PIERRE. Et si c’était l’annonce d’une de ces épouvantables névroses qui vous minent peu à peu, qui vous usent, qui vous détruisent lente- ment et sûrement... Si c’était cela, dis?