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810 REVUE DES DEUX MONDES. ADRIENNE, arpentant le salon. Je m’en moque pas mal, d’être indigne!.. Parce que j’ai dîné chez les Favreuil! Je vous demande un peu!.. Qu’est-ce que j’ai à faire ici, quand papa n’y est pas? MEYNARD. Tu avais ce soir à y tenir compagnie à ta belle-mère, puisque tu savais que ni ton père ni ton frère ne dînaient à la maison... C’était donc ton devoir de rentrer. ADRIENNE. Mon devoir, mon devoir ! . . MEYNARD. Oui... ça ne te plaît pas, ce mot-là, n’est-ce pas? Et encore moins ce qu’il implique, c’est-à-dire la soumission à une règle morale. ADRIENNE. Oh! la règle morale... (Elle fait rapidement le geste d’un pied de nez.) MEYNARD, bas à M lle Jauzon. Pardon... Est-ce que c’est du positivisme, cela? (Haut à Adnenne.) Ma chère amie, prends garde! La règle morale se venge tôt ou tard des pieds de nez qu’on lui fait! Tu as tort de te moquer d’elle. Tu verras, quand tu seras mariée et que tu auras des en- fans, si... ADRIENNE. Ah! bien, si vous croyez que c’est pour avoir des enfans que je me marierai!.. MEYNARD. Dame, tu sais, ordinairement... ADRIENNE. Je ne peux pas les sentir, d’abord, les enfans! MEYNARD. Ça ne vaut pas les chevaux, hein?.. Il est certain que lorsqu’on pense à ce qu’ils deviennent, quelquefois, en grandissant, quand on te regarde, par exemple, quand on t’écoute parler comme tu le fais en ce moment,., ma parole d’honneur, ça guérirait de l’envie d’en avoir!.. Alors, pourquoi te maries-tu?