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révélé : « Ah ! (je veux n’être pas) si ce péché vous est jamais pardonné… » dit le Seigneur Iahvé Sebaoth.


Ézéchias prit le seul parti que ses tergiversations antérieures eussent laissé à son choix. Il envoya à Lakis faire sa soumission au roi d’Assyrie. Sonnachérib lui imposa une contribution de trois cents talens d’argent et trente talens d’or. Il fallut livrer tout l’argent qui se trouvait dans le temple et dans les trésors du palais, et cela ne suffit pas. Pour compléter la somme, on dut enlever le revêtement des portes du temple et détacher les riches chambranles qu’Ézéchias lui-même avait fait plaquer. Padi fut rétabli dans sa royauté d’Ékron, et reçut, en dédommagement de la prison que lui avait fait subir Ézéchias, quelques villes de Juda. Les rois d’Asdod et de Gaza furent également récompensés de leur fidélité à l’Assyrie aux dépens d’Ézéchias.

Si la campagne s’était terminée de la sorte, le triomphe du iahvéisme eût été médiocre. La conscience nationale voulait quelque chose de plus éclatant. Soit que la légende, par les combinaisons historiographiques artificielles qui lui sont habituelles, se soit donné pleine carrière ; soit qu’en effet la campagne de Sennachérib ait mal fini pour les Assyriens, le parti prophétique raconta la chose comme une victoire complète de Iahvé. Sennachérib, à ce qu’il paraît, crut à une trahison d’Ézéchias et eut un retour offensif contre Jérusalem. Une armée égyptienne se formait à Péluse ; Tahraqa accourait d’Éthiopie pour soutenir la coalition.

Sennachérib envoya, dit-on, de Lakis, les trois principaux personnages de son gouvernement, le tartan, le chef des eunuques et le grand échanson, avec des forces considérables pour obtenir la soumission complète de Jérusalem. L’armée assyrienne campa près du conduit de la Piscine supérieure, dans la plaine qui est au nord-ouest de Jérusalem. Les trois chefs assyriens exprimèrent le désir de parlementer, et le roi délégua, pour s’entendre avec eux, Éliaqim fils de Helqia, Sebna et Ioah fils d’Asaf, le mazkir. Le grand échanson montra aux Juifs ce qu’il y avait de présomptueux dans la conduite d’Ézéchias, de vain dans l’alliance avec l’Égypte, ce roseau brisé qui perce la main de celui qui s’y appuie. Leur Dieu Iahvé a été mécontenté par le roi, qui a eu la fâcheuse idée d’abolir son culte ailleurs qu’à Jérusalem. Iahvé lui-même protège les Assyriens, puisqu’il leur livre sa terre. Les parlementaires finissaient, dit-on, par la raillerie. Les Juifs ont espéré dans les chars et les cavaliers de l’Égypte. Les Assyriens leur donneront, s’ils veulent, deux mille chevaux à condition qu’ils trouvent des cavaliers pour les monter.