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HALLALI ! 505 d'hui ou demain, pour votre mariage, je m'imagine que, la se- maine prochaine, vous serez fort occupé. Sur ces mots, prononcés du ton le plus naturel, M. de Butten- court reprit flegmatiquement le chemi» du château en compagnie de Real, qui, ayant deviné ou cru deviner, derrière les paroles de son hôte, une menace à échéance différée, ne songeait plus qu'aux moyens de l'empêcher de communiquer avec Marie -Madeleine avant que celle-ci n'eût parlé publiquement. Au cours de la soirée, il réussit à aborder la jeune fille en un moment où elle était isolée. — Je ne vous demande, lui dit-il rapidement, que de ne pas entendre, de ne pas écouter M. de Buttencourt avant de m'avoir donné la réponse que j'attends... Ah! je vous demande aussi de me donner cette réponse devant lui, devant tout le monde. Si cela vous coûte trop, chargez de ce soin votre cousine. — Et... et si j'y voyais un inconvénient, un péril grave? — A laire de votre cousine votre porte-paroles? — A parler de cette date, d'une manière quelconque et par quelque organe que ce soit. — Un péril pour vous? — Pour moi peut-être, ou pour vous... — Laissez-moi vous dire encore que cela me regarde et ne re- garde que moi. Vous ne courez personnellement aucun danger, surtout si vous n'avez rien à démêler avec M. de Buttencourt. Or, il y a un moyen d'éviter presque sûrement tout entretien avec lui, c'est de demeurer le plus possible auprès de sa femme, de ne pas la quitter, au besoin, de la soirée. Ce conseil inspira à la jeune fille l'idée'.et l'espoir de se servir de sa cousine pour détourner le'coup qui menaçait Frantz. Il ne lui parais- sait pas douteux que le plan du baron ne consistât essentiellement à essayer, une fois de plus, d'agir sur elle par intimidation et à se venger sur son rival en cas d'insuccès. Si donc elle pouvait per- suader à Hélène de l'aider à ne pas prendre encore un parti défi- nitif, ou plutôt à ne pas proclamer encore une échéance certaine, il y avait des chances pour qu'elle réussît à conjurer l'éclat immi- nent et la catastrophe qui en devait résulter. — Car, vu l'habileté du baron à tous les sports et sa grande force musculaire, elle lui attribuait d'avance la victoire dans toute lutte avec Frantz où l'arme ne serait plus la parole. Au moment où l'on se retirait, elle dit tout bas à M me de But- tencourt : — J'ai à te parler. Puis-je t'accompagner dans ta chambre? — Certainement. Ce ne sera pas, au reste, la première fois, et je ne vois pas pourquoi tu m'en demandes la permission.