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année des études, fut déjà commencé en ses parties les plus élémentaires dès les classes de seconde et de rhétorique. En Italie, on vient d’inaugurer ce nouveau système : la psychologie, la logique, la morale et la philosophie générale sont enseignées dans les trois dernières classes du lycée. Nous avions demandé aussi que l’enseignement de chaque science particulière, physique, physiologie, histoire, etc., comprît dans son programme l’étude des principes philosophiques et des conclusions générales de chaque science. Les programmes nouveaux d’Italie donnent une place, principalement dans les sciences naturelles, aux questions générales et philosophiques. Il y a donc là, en somme, un premier essai pour organiser et coordonner philosophiquement les études. Mais, les programmes ayant été rédigés dans un esprit positiviste, certaines questions, selon nous essentielles, y ont été à tort sacrifiées.

Ce qui est sûr, c’est que la nation qui saurait introduire dans l’enseignement l’organisation la plus puissante et la plus une aurait par cela même, dans le domaine intellectuel, une supériorité analogue à celle des gouvernemens et des armées fortement organisés. De plus, il est incontestable que tout un groupe nouveau de sciences, — les sciences sociales, — est en train de grandir et finira par arriver au premier rang dans le prochain siècle. L’éducation trop exclusivement littéraire ayant provoqué une réaction en faveur des sciences ; l’éducation scientifique, à son tour, n’ayant point donné ce qu’on en espérait, il est facile de prévoir que la caractéristique de l’enseignement, dans un avenir plus ou moins lointain, serai la direction morale et sociale, imprimée dès le début à toutes les études et à toutes les méthodes ; par cela même, ce sera la systématisation succédant au vice actuel qu’on désigne par le mot barbare de particularisme ou de spécialisme. Ce sera aussi l’avènement des véritables « humanités, » qui doivent avoir pour base la connaissance de l’homme et des sociétés humaines. — « La science même de la nature, a-t-on dit, vaut surtout par ce qu’elle contient d’humanités. » — C’est donc avec raison qu’on a récemment désigné l’étude des sciences, telle qu’elle devrait être organisée, par le nom « d’humanités scientifiques. » Nous nous proposons de montrer comment nous entendons cette organisation. Selon nous, le but que doivent se proposer de véritables humanités scientifiques, c’est la transformation des sciences matérielles en sciences morales, par leur esprit, par leurs méthodes, par leurs principes et leurs conclusions, enfin par leur histoire et leurs conséquences sociales. Dans une étude ultérieure, nous nous occuperons des humanités classiques, qui doivent, à notre avis, être réformées dans le même sens.