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les registres avec soin, déclare qu’il n’en a pas trouvé d’autre exemple.

Rabelais et Félix Platter nous conduisent jusqu’à la seconde moitié du XVIe siècle. C’est l’époque où commencent les guerres religieuses. À ce moment, tous les fléaux s’abattent à la fois sur la France. L’école de médecine en a cruellement souffert comme l’école de droit. Seulement elle se releva dès que les temps devinrent moins sombres. Avec Henri IV, elle recommence à vivre, mais d’une vie un peu différente. Tout d’abord le nombre des chaires royales est augmenté, ce qui diminue l’importance de l’enseignement libre des licenciés et des docteurs. Ces professeurs privilégiés, que le roi paie, se partagent entre eux la science ; chacun d’eux en prend une portion, dont il fait son domaine, et où bientôt il empêche les autres de pénétrer ; peu à peu, ils feront taire tout le monde autour d’eux et garderont seuls la parole. Naturellement les rois s’attribuent le droit de nommer les premiers possesseurs des chaires qu’ils ont créées ; après eux les places sont mises au concours, ou, comme on disait alors, « données à la dispute. » Ces concours étaient des épreuves très sérieuses, qui se prolongeaient souvent au-delà d’une année. Mais déjà l’autorité se permettait toute sorte d’empiétemens et d’irrégularités. Il lui arrivait de ne pas choisir le candidat que les juges avaient mis au-dessus des autres ou même de disposer sans façon de la chaire avant que la lutte ne fût terminée. La faculté avait beau protester et se plaindre, le roi était le maître, et il fallait bien subir sa volonté. C’est un régime nouveau qui commence pour les universités, comme pour toute la France ; on ne les laisse plus se gouverner comme elles veulent et régler leurs affaires toutes seules. L’impulsion leur vient de plus en plus du pouvoir central. L’évêque continue à en être le chef apparent ; il signe toujours les diplômes, mais la main qui mène tout est ailleurs. Au XVIIe siècle, on remarque chez le premier médecin du roi une velléité de se faire le directeur des écoles de médecine du royaume en même temps que son confesseur tend à devenir une sorte de ministre des cultes.

D’autres changemens, que l’école subit vers la même époque, ne l’altèrent pas seulement dans sa constitution, mais en modifient tout à fait l’esprit. Le moyen âge n’avait connu qu’une façon d’enseigner : le professeur lisait, c’est-à-dire prenait pour base de sa leçon le texte d’un auteur important et se contentait de le commenter après qu’il l’avait lu. Aussi les leçons s’appelaient-elles des lectures, lectiones. Cette méthode était un legs des grammairiens de l’empire, que les maîtres du moyen âge avaient pieusement recueilli. Seulement à la lecture, ils joignaient la dispute