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beaucoup plus forts. Un lait ordinaire de vache abandonne plus du huitième de son poids de matières solides ; 120 à 130 grammes par litre, terme moyen. Le dépôt serait beaucoup plus lourd (un bon quart en sus) si l’on traitait le lait de brebis, plus lourd encore avec le lait de buffle. L’extrait de lait de jument est aussi considérable, mais, en revanche, le lait de femme et celui d’ânesse se trouvent infiniment plus aqueux et, sous ce rapport, sont inférieurs au lait de chèvre lui-même.

Il est assez curieux de noter que la quantité de cendres abandonnées par l’extrait, après calcination de celui-ci, est loin de présenter un rapport constant avec le poids résiduel. Si un litre de lait de vache fournit en moyenne 3/4 de gramme de cendres, un litre de lait de buffle ou de brebis laissera un résidu beaucoup plus lourd. Il s’agit de laits riches en extrait sec ; mais, au contraire, le lait de jument, presque aussi bien partagé en matières solides, se réduira à fort peu de chose, après calcination, tout comme le lait si aqueux de l’ânesse.

Il ne faut pas s’imaginer que les divers laits ne se distinguent que par leur concentration, par la quantité d’eau que les lois physiologiques leur ont assignée. Autrement dit, si cette affirmation était vraie, il suffirait, par exemple, d’ajouter une petite quantité d’eau pure au lait de vache pour reproduire du lait de chèvre, ou d’étendre beaucoup celui de brebis pour obtenir un liquide presque identique avec le lait d’ânesse. A l’aide des seules notions expérimentales que nous avons acquises jusqu’à présent, nous ne pouvons répondre scientifiquement à cette question ; nous sommes même d’autant plus embarrassé pour la résoudre qu’il est positif que l’extrait sec des différens laits augmente ou diminue en même temps que la richesse en crème ou en beurre. L’extrait du lait de brebis, fluide très crémeux, l’emporte sur celui du lait de chèvre, bien moins gras, et surpasse de beaucoup le résidu provenant d’un lait pauvre en beurre, comme celui de l’ânesse. Néanmoins, le sens du goût, l’expérience journalière, démontrent clairement que cette règle si simple n’est pas exacte. Nous voilà donc forcé d’étudier les diverses substances dont l’ensemble forme l’extrait sec.

Parlons d’abord de la caséine, qu’on nomme aussi caséum, du mot latin caseus, fromage. Tout le monde a vu le lait, passablement fluide dans son état normal, se « cailler » sous l’influence de la « présure » retirée de l’estomac des ruminans, ou sous l’action du suc de certaines plantes comme l’artichaut, par exemple ; mais il sera plus intéressant de faire usage d’un réactif minéral comme un des acides chlorhydrique, sulfurique, nitrique, ou même d’avoir recours à l’acide acétique étendu. D’autres agens produisent le