Page:Revue des Deux Mondes - 1889 - tome 96.djvu/844

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

du rendement du lait ; mais alors celui-ci est beaucoup plus clair, l’augmentation n’est qu’apparente et se réduit à un simple bénéfice de volume. Comme on peut le croire, un agronome n’oublierait pas de signaler l’influence de la nourriture et celle de l’hygiène aux champs ou à l’étable ; mais un pareil sujet, outre qu’il est loin d’être élucidé à fond, concerne plutôt l’économie rurale que la chimie proprement dite.

En dehors même du laboratoire du savant, l’emploi du lactodensmiètre est à présent fort répandu. Il y a près de cinquante ans que Bouchardat et Quévenne imaginèrent l’instrument. Qu’on se figure un aréomètre construit en verre comme tous les autres appareils de ce genre, lesté à sa base par une boule pleine de grenaille de plomb et surmonté d’une tige cylindrique, garnie à son intérieur d’une double graduation sur papier. On plonge le lactodensimètre (il est plus court de dire le pèse-lait) dans le lait dont on veut connaître la densité, et on observe le numéro de la division correspondante au niveau d’affleurement. Si cette division porte le numéro 30, par exemple, on dit que le lait pèse 30 degrés[1]. Pour le chimiste, une indication de ce genre offre un sens précis : un litre du lait en question pèse 1,030 grammes, soit 30 grammes de plus qu’un litre d’eau. On comprend facilement que le pèse-lait ne soit pas un instrument d’une précision rigoureuse ; l’on aurait tort de compter sur l’exactitude absolue de la dernière décimale. Toutefois, après une vérification minutieuse, un appareil bien contrôle peut rendre de grands services à cause de la rapidité de ses indications.

En tous les cas, il nous a mis à même de constater, ce que n’ignore personne, que le lait est plus lourd que l’eau. Un pareil excès de densité ne tient naturellement pas à la présence des corps gras, beaucoup plus légers que l’eau, mais il résulte de l’influence des autres matières dissoutes dans le liquide ou disséminées dans ce dernier à l’état de simple suspension, comme la caséine, le sucre et divers sels. Jamais le lactodensimètre immergé dans un lait naturel et pur ne marque moins de 16, ni plus de 40 degrés (ce qui signifie que la densité du lait est comprise entre 1,016 et 1,040). L’écart est-il bien notable ? Non, sans doute, et, encore, dans la pratique, convient-il de resserrer sensiblement les valeurs extrêmes. Les liquides très lourds ou très légers ne se rencontrent que par exception ; de plus, le lait pur ou le lait raisonnablement baptisé,

  1. Si la température du lait n’est pas très voisine de 15 degrés centigrades, il faut avoir recours à des tables que les fabricans vendent avec l’aréomètre et calculer la valeur d’une petite correction, additive au-dessus de 15 degrés, soustractive au-dessous.