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Louis-Napoléon interdit, par simple décret, la réunion des concessions à peine de déchéance. Puis le silence se fait jusqu’aux dernières années de l’empire ; — une tentative isolée de M. Dalloz, vers 1860, ne mérite d’être citée que pour mémoire ; — en 1866, cependant, le nouveau régime économique inauguré par les traités de commerce amène l’abrogation de la législation spéciale sur le minerai de fer. La crise houillère de 1872-1873 réveilla la question. On sait comment le gouvernement ouvrit une enquête et les plaintes qu’y firent entendre les exploitans : les redevances tréfoncières et les indemnités pour occupations à la surface grevaient lourdement leur budget ; il y avait nécessité de restreindre la servitude de protection établie dans un rayon de 100 mètres autour des habitations et des clôtures murées ; il » réclamaient, en outre, la faculté d’établir leurs voies d’accès, — routes, canaux, chemins de fer, — non-seulement au-dessus de la concession, mais au besoin à travers les propriétés voisines. La loi du 27 juillet 1880 leur donna satisfaction sur ces deux derniers points. Et cependant six ans à peine avaient passé, que de nouveau l’idée d’une refonte de la législation des mines revenait sur le tapis.

Cette instabilité, ces conflits sans cesse renaissans, nous en avons montré la cause. Démembré de la superficie et protégé de l’administration, équivoque dans ses rapports avec le fonds supérieur et précaire vis-à-vis de l’État, mal dégagé de ses anciennes attaches régaliennes, et en même temps réfractaire aux définitions du code civil, le droit des concessionnaires de mines ne peut fonctionner dans des conditions absolument normales. Est-ce un motif suffisant pour renoncer à un régime qui, malgré tout, a fait ses preuves ? Le conseil d’État s’est toujours prononcé en sens contraire. À toutes les époques et sous tous les régimes, en 1878 comme en 1848 et en 1866, — il s’est mis à la traverse, et ses représentations avaient, jusqu’ici, fait abandonner l’idée d’un remaniement général dont il lui paraissait que les inconvéniens dépasseraient de beaucoup les avantages. Les auteurs des récentes propositions de réforme se défendent d’ailleurs de porter atteinte aux bases de notre droit minier. Tous, sans exception, protestent qu’il s’agit seulement d’améliorations de détail. Nous avons voulu montrer, en interrogeant les traditions et l’histoire, dans quel esprit cette révision, respectueuse des principes actuels, devrait être tentée, si elle a lieu. Quant aux théories beaucoup plus radicales auxquelles la préparation du nouveau code général des mines a donné l’occasion de se produire, elles seront l’objet d’une prochaine étude.


RENE DE RECY.